Book Title: La Recherache Des Tresors Souterriains
Author(s): Nalini Balbir
Publisher: Nalini Balbir
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Page #1 -------------------------------------------------------------------------- ________________ a la recherche des tresors souterrains NALINI BALBIR Comme la botanique est, en Inde, avant tout au service de la pharmacopee, la connaissance de la phytonymie repose, pour une large part, sur les travaux des specialistes de l'ayurveda. C'est ainsi qu'on doit a M. G.J. MEULENBELD au moins deux listes, fort utiles, de plantes medicinales accompagnees, le cas echeant, d'identifications toujours prudentes, sans parler de diverses observations ou suggestions rencontrees au fil des pages du Madhavanidana traduit et annote par lui. Mais on a peu note que la connaissance du monde vegetal a pu egalement etre utilisee a des fins toutes materielles et mise, en quelque sorte, au service de l'artha pour la recherche des tresors que recele la terre (vasumdhara). Tel sera le theme de ces pages, ecrites en francais, en hommage a un savant pour qui notre langue n'a pas de secret. 1. Dans l'Inde des contes, les chasseurs de tresors disposent de differents moyens pour parvenir a leurs fins. Ils pourront, la chance aidant, les decouvrir inopinement. Si leurs merites sont nombreux et si leur karman le veut, ils seront conduits sans effort a l'emplacement approprie ou beneficieront d'une indication que leur aura fournie une divinite bienveillante. S'ils ont eu l'occasion de frequenter des yogin de tout poil, ils utiliseront peut-etre la pate, la racine ou le collyre magique que ces maitres leur auront remis pour prix de leurs bons et loyaux services, et reussiront s'ils n'ont pas eu affaire a un charlatan.deg S'ils sont livres a Je remercie M. A. Rosu qui m'a fait d'utiles remarques. - La liste des abreviations les plus frequentes figure a la fin de l'article. - Dans le cas de textes en prose ou de textes mixtes (prose/vers), les references sont aux pages et aux lignes des textes. * apres un nombre indique un passage en vers. . 1 'Sanskrit names of plants and their botanical equivalents': Appendice 4 (p.520611) dans The Madhavanidana and its Chief Commentary. Chapters 1-10. Introduction, Translation and Notes. Leiden 1974; 'G.J. Meulenbeld's Additions to his "Sanskrit Names of Plants and their Botanical Equivalents": Appendice 1 (p.425-465) dans DAS. 2 Ex. KSS 7.1.37sqq. (Ocean III, p.157-158). 3 Ex. Pancatantra 1.20 (Dustabuddhi et Papabuddhi); KSS 4.3.37sqq. (Ocean II, p.159-160); etc. 4 Ex. Pancatantra V.3 (siddhi-varti), et, plus tard, Katharatnakara de Hemavijaya Page #2 -------------------------------------------------------------------------- ________________ Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) eux-memes, rien n'est pourtant perdu, - pourvu qu'ils sachent regarder autour d'eux. La vegetation viendra en aide a ceux qui se montreront capables d'interpreter ses signes. Car, comme l'ecrit Dandin (anterieur au VII s.), il y a des 'arbres qui indiquent la presence de divers tresors au-dessous d'eux' (... vividha-nidhi-sucakanam mahiruhanam adho niksiptan vasu-purnan kalasan siddhanjanena jnatva ...)5. La croyance est tenace: 16 nidhis taru-vikarena spastam akhyayate loke 'Une transformation (quelconque) dans un arbre indique clairement la presence d'un tresor tout le monde le dit', ... note encore une strophe d'allure proverbiale citee par Bana (milieu du VIIe s.) dans le Harsacarita. La glose de Sankara, le commentateur de ce kavya, montre que le lien de cause a effet est reversible: le comportement de l'arbre permet de conclure a la presence d'un tresor; inversement, la presence du tresor influe sur le comportement des differentes parties de l'arbre: yatradho nidhis, tatra parinahodgatadhomukha-sakha-muladibhajo vrksa bhavanti 'La ou il y a, en-dessous, un tresor, les arbres se mettent a avoir des branches qui surgissent du tour de l'arbre, des racines dirigees vers le bas (?), etc.' Dans le Harsacarita toujours, Banna confirme l'attirance (presque magnetique) de l'arbre pour le tresor enfoui dans son sous-sol et l'inclinaison de ses surgeons qui en est la manifestation; au surgeon de l'arbre aux tresors il compare l'attitude de l'homme avide d'argent ainsi decrit: (XVI-XVIIe s.): ndeg 51 (trad. J. HERTEL, Munchen 1920, vol.1, p.151sqq.) (racine magique); Dasakumaracarita (ed. M.R. KALE, Delhi *1966), Purvapithika 4, p.36 (siddhanjana); etc. Sur varti (que LANCEREAU traduit a tort par 'boule') et anjana, voir infra SS 3.1 (n.42). 5 Dasakumaracarita (ed. KALE), Purvapithika 4, p.36. 6 Livre 4, strophe 3 (ed. P.V. KANE. Delhi 21965, p.4). La traduction de E.B. COWELL et F.W. THOMAS (London 1897, p.106): 'By misshapen trees a treasure ... is clearly in the world revealed' pour taru-vikarena, me parait excessive. 7 Cette traduction a pour elle de respecter la grammaire, qui exige normalement que chaque substantif soit respectivement mis en rapport avec un qualificatif (yathasankhya; AiGr II,1, p.169-170, SS 73; H. BRINKHAUS, 'Yathasamkhya und versus rapportati': Studien zur Indologie und Iranistik 7.1981, p.21-70), mais le texte est curieux: ce sont generalement les branches qui sont dirigees vers le bas en pareil cas. Page #3 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains nidhi-padapa-prarohasyeva dravinabhilasad adhomukhi-bha vatah.3 La litterature jaina n'est pas en reste, comme le montrent les deux episodes suivants relates dans le troisieme livre de la Samaraiccakaha (= SK), roman de Haribhadra (VIII s.), ou dans le remake sanskrit en anustubh du a Pradyumnasuri (XIII s.)." (i) 'Je me rendis au Mont Laksmi, tout proche de [ma] ville. Voila que, dans un coin, je remarquai un cocotier (pk. nalieri, sk. nalikeri: Cocos nucifera Linn.)10: la masse de son feuillage etait bien brillante et ses longs surgeons (dhara(pa)vitthadihapayago) avaient penetre dans la terre. Sa vue excita ma curiosite: "Eh bien! C'est etonnant que le surgeon d'un arbre d'une taille pareille soit descendu aussi bas et ait penetre dans la terre (eddaha-mettassa payavassa eddaha-mettao vibhagao oyariuna payao dharanim pavittho, SK 138. 11-12). Il doit surement y avoir une raison." Torture par la convoitise (lobha), le meme personnage etait deja venu sur ces lieux dans l'une de ses existences anterieures, comme le lui revele un moine: (ii) 'L'endroit etant tres feuillu, tu t'y reposas un moment. Et voila que tu remarquas un surgeon de pomada qui sortait a cet endroit. Tres excite, tu dis: "Mangalaka, il doit y avoir 12 17 Harsacarita, livre 7 (ed. KANE, p.65); trad. COWELL-THOMAS, p.220: 'downbent through greed of wealth, like a tree branch over a treasure'. 9 Haribhadra, Samaraicca Kaha. A Jaina Prakrta Work. Ed. by H. JACOBI. Volume I. Text and Introduction. Calcutta 1926 (Bibliotheca Indica 169) et Candragacchiya-frimat-Pradyumnasuri-viracitam tri-samksepa-Samarudityacaritam,publie par le Sri Jinasasana Aradhana Trust. Bombay Vira samvat 2514, 3.44sqq. et 3.96sqq. L'edition de JACOBI (Ahmedabad 1906) est actuellement difficile a trouver. Le 'sanskrit jaina' de ce texte a fait l'objet d'observations souvent utiles dues a E.D. KULKARNI, "The language of Samaradityasamksepa of Pradyumnasuri': Proceedings and Transactions of the All-India Oriental Conference, XXth Session Bhubaneshwar Oct. 1959. Vol.II, Part I. Ed. by V. RAGHAVAN. Poona 1961, p.241-253. On peut lire un autre episode comparable dans l'UK 957.4*sqq. 10 Les doublets, dus aux echanges faciles entre / et r, sont nombreux en sanskrit (DAS, p.124), comme en prakrit (PSM, s.v. naliera et nariera). 11 Voir infra SS 3.3.1. sur pk. paya(g)a. 12 Dittho... pomada-jjhadayassa imammi paese viniggao payao (SK 144.11-12). Page #4 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 18 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) ici beaucoup d'argent (ettha paese kenai davina-jaena hoyavvam, 144.13)." - "Regardons", proposa-t-il. - "Laisse cela", repondis-tu. "Je disais cela par simple curiosite, 'non par desir d'argent." - "Mais je suis encore plus curieux", dit Mangalaka. "Regardons pour en avoir le coeur net." Et, malgre tes reticences, il se mit a creuser avec une pique comme ceci (tahavihena tikkha-sara-katthena khanium, 144.17), et, dans un tout petit coin, il apercut le col d'un vase (kalasa-kanthao).' On l'aura remarque: les signes peuvent etre divers. Dans le second cas, il s'agit d'un surgeon de l'arbre qui semble provenir du sous-sol. C'est cette singularite qui attire l'eil du jeune homme. C'est encore une deduction fondee sur la connaissance de la flore qui, dans un recit du Kathasaritsagara (6.7.133sqq.), permet a l'habile roi Prasenajit de demasquer le voleur du tresor enterre par un brahmane: 'Brahmane, lui demande-t-il, y a-t-il, sur le terrain ou tu as enfouis les dinars, un signe de reconnaissance quelconque (upalaksanam, 6.7.144)?'13 - 'Il y a, Sire, un petit arbre (ksudrah padapah) dans la foret. L'argent y a ete enterre, a son pied (145).' Cette simple indication suffit pour donner au roi l'assurance qu'il sera capable de retrouver le tresor perdu. Usant d'un stratageme, il feint un mal de tete, convoque tous les medecins de la ville, et procede a un interrogatoire individuel, systematique et prive de chacun. Apprenant que l'un d'eux a pour patient un marchand qu'il soigne depuis deux jours avec de la nagabala!4, le roi se rend aupres de lui; la plante, lui est-il explique, a ete apportee par le domestique du marchand. Il n'en faut Dans le Samaradityasamksepa (3.96), l'arbre est appele prapunata. Les deux termes semblent designer une meme realite, la legumineuse Cassia tora Linn. (sk. cakramarda, edagaja ou prapunnada), sous-famille des Cesalpiniees (ou Cesalpiniacees); voir PSM, s.v. pomada, paumada et pamada, MW, s.v. padmata et prapunata, CDIAL 8689. 13 La phrase est impersonnelle. La traduction par ....do you know of any marks by which you can recognise the place where you buried your dinars?' (Ocean III, p.119) est facheuse et nuit a l'intelligence du recit. MEHLIG, en revanche, traduit avec raison: 'O Brahmane, gibt es denn an der Stelle, wo du die Dinare vergraben hast, nicht irgendein Merkmal?' (vol.1, p.463). 14 Appartenant au groupe des cinq vegetaux dit balapancaka, que certains rattachent au genre Sida, le phytonyme nagabala est difficile a identifier avec precision, car les possibilites sont multiples: cf. DAS, p.288;461 (Appendice du a M. Meulenbeld). Page #5 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 19 pas plus a Prasenajit pour etre sur de tenir le coupable et lui faire rendre gorge sans mot dire. La raison? 'Il sait que cette plante medicinale vient dans ce type de milieu.:15 On est en droit de trouver la formulation un peu trop vague. On aurait souhaite connaitre l'espece precise de l'arbre au pied duquel croit de preference la n; a moins que sa croissance ne soit favorisee precisement par la presence du tresor enfoui dans le sous-sol. Mais, telle quelle, l'allusion, ajoutee aux passages precites, suggere qu'il a du exister un savoir -- on n'ose dire une 'science' - de la chasse au tresor, ou plus largement de l'exploration des richesses du sous-sol, que semblent maitriser les personnages rencontres; bref, un savoir de l'invisible (le monde souterrain) fonde sur le visible (l'environnement ecologique). 2. Or le vieil- et le moyen-indien connaissent au moins deux termes techniques relatifs a ce canton du savoir et a ses specialistes: nidhi-vada, vadin et khanya-vada, ovadin (desormais: n.-v. et kh.-v.), sans compter les equivalents par substitution (nidhana au lieu de nidhi etc.). Les dictionnaires usuels rendent insuffisamment compte de leur vitalite,16 mais des sondages operes dans la litterature narrative montrent qu'elle est reelle. 2.1. La lecture du KSS 6.8.69sqq. conduirait a penser que les deux termes sont tout a fait synonymes: d'abord appeles khanya-vadin (6.8.69 et 73), les memes personnages sont, une strophe plus loin, qualifies de nidhana-vadin. Ailleurs, on rencontre une juxtaposition comparable dans 15 Janann osadhim tam tad-udbhavam (157): "knowing that that simple grew in such spots' (Ocean III, p.120); 'denn er wusste, dass dieses Heilkraut an solchen Platzen wachst' (MEHLIG, vol.1, p.464). 16 Les dictionnaires d'APTE et MONIER-WILLIAMS et les Nachtrage du dictionnaire de St. Petersburg ne donnent qu'une seule reference a la Kadambari, infra) pour nidhivada. Khanya-vadin ne figure que dans les Nachtrage, avec une seule reference (infra), et dans le Buddhist Hybrid Sanskrit Dictionary (infra). Le PSM, quant a lui, ne connait aucun des equivalents prakrits de ces termes. Aux references que j'ai pu trouver au cours de lectures chanceuses, s'ajoutent, pour kh.-V., celles des dictionnaires sanskrit et prakrit en cours d'elaboration a Poona, que leurs responsables respectifs actuels. MM. les Professeurs S.D. JOSHI (Encyclopaedic Dictionary of Sanskrit on Historical Principles) et A.M. GHATAGE (A Comprehensive Critical Dictionary of Prakrits) ont eu l'extreme amabilite de me communiquer. Qu'ils en soient tous deux vivement remercies. Page #6 -------------------------------------------------------------------------- ________________ Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) une hyperbole d'allure poetique: a Pratisthana, dont la beaute et la richesse sont decrites a profusion, 'les demeures regorgent a tel point de quantites innombrables de tresors que le kh.-v. est tombe en desuetude'.17 En fait, il est facile de voir que les n.-v. constituent un sousgroupe inclus dans l'ensemble forme par les kh.-v. Les competences de ces derniers s'etendent, comme leur nom l'indique, a tout ce qui se trouve enfoui (dans la terre), khanya etant a analyser dans ce compose comme krtya affaibli a sens simplement passif, equivalent d'un banal nom abstrait (cf., de meme type, geya-jna; etc.).18 Que l'on suppose un agent (humain) determine, a qui imputer le fait d'avoir creuse, et on aura, pour kh.-v., le sens de 'chasseur de tresor' (litt. 'specialiste en objets enfouis [par X]') et, donc, une interchangeabilite facile avec n.-v. Que l'on considere simplement le resultat d'un enfouissement naturel (ou effectue par un agent surnaturel: dieu, naga, etc., infra SS 4), et on aura, parmi les specialisations semantiques, celle de 'mineralogiste' (retenue par exemple dans les Nachtrage ou le Buddhist Hybrid Sanskrit Dictionary). Tout en temoignant de ces hesitations, l'interpretation tibetaine de kh.-vadin atteste dans la Mahavyutpatti (IX* s.) semble donner la preference au premier sens, puisque le mot y est rendu par gter(ba-)lta-ces-pa.19 Or gter est, couramment, le terme qui sert a traduire sk. nidhi, nidhana ou kosa20 (mine' se disant gter-kha). L'ensemble, sig 20 17 Sankranta-nidhana-kotibhir bhavanaih pralinah khanya-vadah: Soddhala, Udayasundarikatha (XIe s.). With introduction etc. ... by C.D. DALAL and ... E. KRISHNAMACHARYA. Baroda 1920 (GOS 11), 21.23. Le terme revient lorsqu'il s'agit de decrire la vaillance d'un ministre: 'il savait deterrer les racines des bambous que sont les ennemis' (khanyavadi vairi-vamsa-mulasya, 24.22). Cet emploi metaphorique, typique d'un style recherche, repose plutot sur le sens concret (/khan + mulam) que sur la valeur technique ici etudiee (Jkhan + nidhi, etc.). 18 Il existe, de la racine khan, plusieurs formes d'adjectif verbal: khanya, khananiya, kheya (W.D. WHITNEY, Roots; AiGr II,2, p.793 et 798; Panini 3.1.123). Mais khanya n'est guere atteste que dans un passage (obscur) de la Taittiriya-samhita (AiGr II,2, p.791) ou, tardivement, dans la Smrticandrika (IV.555.20) et le NP (infra, SS 3.1). Sur l'affaiblissement semantique des krtya et leur evolution en nom d'action: AiGr II,2, p.801 et L. RENOU, Grammaire sanscrite, p.205-206 et 232. 19 R. SAKAKI, Mahabyuttopatei: Bonzo Kanwa Yonyaku taiko. Ryozaburo. Kyoto 1916-25, p.259, ndeg 3753. 20 H.A. JASCHKE, A Tibetan-English Dictionary with Special Reference to the Prevailing Dialects. Delhi 1987 (1881), p.208. - Je remercie Mme A. Chayet, Mlle C. Page #7 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains nifiant 'celui qui sait voir le tresor cache', montre donc que kh.-v. est compris comme equivalent de n.-v. Les traductions chinoise et japonaise vont dans le meme sens, tout en soulignant l'ambiguite du terme.21 D'autre part, une anecdote attestee dans les commentaires canoniques jaina (VI-VII s.) met en scene un 'connaisseur de l'enfoui' qu'elle designe par le compose pk. khaya-janaa (rendu dans les chaya ou les adaptations sanskrites par khata-jnayaka, khata-parijnana-kusala), dont il est a peine besoin de preciser qu'il constitue un calque de kh.vadin.22 Or ce personnage est consulte par ses congeneres parce qu'il est capable de dire a quelle distance trouver de l'eau et comment proceder pour la faire apparaitre: c'est donc un sourcier ('Brunnenfinder', ecrit justement E. Leumann dans sa traduction inedite de ce passage; voir n.22). La version de l'Upadesapada de Haribhadra, quant a elle, attribue a ce meme personnage 'la connaissance des veines aquiferes, etc.' (sirai-nanam).23 Or sk. sira est un terme technique avere de la sourcellerie (nom technique specifique: (u)dakargala), qu'emploient tous les textes standard sur le sujet.24 Dans la variante d'ecole (anne benti) de la presente anecdote que l'Upadesapada propose d'autre part, le personnage principal n'est plus un sourcier, mais un expert en chasse au tresor (nihana): tout se passe donc comme si les potentialites d'acceptions incluses dans le terme general khaya-janaa se trouvaient ici doublement precisees. 21 Chojnacki et M. K. Mimaki, sans lesquels je n'aurais pu utiliser les donnees tibetaines. 21 Zhi zang zhe 'celui qui sait ce qui est cache (ou contenu)', neng guan zang zhe 'celui qui est capable de voir ce qui est cache (ou contenu)', yoku fukuzo o mirumono 'celui qui voit bien ce qui est cache', kakuretaru zaiho o mirumono 'celui qui voit le tresor qui est cache'. Je dois ces informations a M. K. Mimaki, que je remercie vivement. 22 Avasyaka IX.58.5 (curni 553.10-11; tika de Haribhadra 424a.3-5; de Malayagiri 524a.8-10); Nandi-vrtti de Malayagiri (en sanskrit), p.160b-161a. Voir N. BALBIR, Recits jaina Die Avasyaka-Erzahlungen' (a paraitre), Annexe 3 ad locum (avec la traduction d'E. LEUMANN). Avasyalla-Studie ien. Stuttgart 1993 23 Vol.1. Baroda 1923, v.11, p.82b-83a. L'Upadesapada est un recueil narratif qui gravite dans l'orbite de la litterature avasyakeenne. 24 Ex. Varahamihira, Brhatsamhita 53.1sqq. (avec la vrtti d'Utpala) (ed. reimpr. par A. TRIPATHI. Varanasi 1968. Sarasvati Bhavana Granthamala 97); Surapala, Vrksayurveda v.301sqq. (DAS, p.391sqq.); etc. Les Chinois parlent, de meme, d'inspecter les veines de la terre' (M. SOYMIE, 'Sources et sourciers en Chine': Bulletin de la Maison franco-japonaise NS 7.1961,1, p.2, n.6). Page #8 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 22 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) Conclusion: kh.-v. est un terme generique qui designe un savoir susceptible d'au moins trois applications distinctes, mais apparentees dans leur methode, puisque, dans l'Inde ancienne, la sourcellerie, comme la chasse au tresor, prend appui sur l'observation du milieu vegetal (infra, SS 3.2.1). Et il semble en etre de meme de la prospection minerale (infra, SS 3.3.4). 2.2. Mais qui sont les nidhi-vadin et autres khanya-vadin, et quel est le statut de leur art? 2.2.1. D'abord des fakirs, mais, en ce cas, ils ne sont pas jaina. Ce sont des yogin d'obedience sivaite, et particulierement des Pasupata. Le vieil ascete dravidien, devot de Candika, dont la Kadambari de Bana (milieu du VIIe s.) brosse un portrait fameux, est dit suivre l'enseignement de cette secte (jima-pasupatopadesa-likhita-mahakala-matena); il maitrise aussi bien la chasse aux tresors, qui est chez lui une passion maladive, que l'alchimie, dont il est fou (avirbhuta-nidhi-vada-vyadhina, sanjatadhatu-vada-vayuna): on retrouvera plus d'une fois ces deux domaines 25 Voir les textes cites dans la note precedente. Le chapitre en reference de la Brhatsamhita est analyse notamment par A. MITRA SHASTRI, 'Varahamihira on the Art of Exploring Underground Water-Springs': Prof. B.K. Barua Commemoration Volume. Gauhati 1966, p.79-83 (repris dans: IDEM, India as Seen in the Brhatsamhita of Varahamihira. Delhi 1969, p.500-503); est presente aux non specialistes par E.G.K. RAO, 'Exploration of underground water springs according to the ancient Hindus': Indian Journal of History of Science 6.1971, p.139-146; a ete recemment traduit en gujrati dans un ouvrage qui souhaite montrer de quelle utilite peuvent etre les prescriptions anciennes et rassemble des temoignages en ce sens: Sri dakargalam [bhugarbhajalasastram]. Mul samskt sloko, gujaran bhasantar, anusangik nodho, ullekho, parisisto. Ed. D.A. VORA. Bhavnagar (s.d.). La Gargasamhita (encore inedite, a ma connaissance) a aussi un chapitre (ndeg 53) sur le sujet d'apres D. PINGREE, Jyotihlastra. Astral and mathematical literature. Wiesbaden 1981 (A History of Indian Literature VI,4), p.70. Voir aussi DAS, p.391413 (avec bibliographie). M. S.R. Sarma (Universite d'Aligarh) m'indique par ailleurs que, ces dernieres annees, les methodes anciennes preconisees par Varahamihira ont ete appliquees avec succes par certains. Les sourciers indiens ne semblent pas avoir connu l'usage de la baguette, bien etabli en Occident (cf. Y. ROCARD, La science et les sourciers. Baguette, pendules, biomagnetisme. Paris 1989; Schulwissenschaft Parawissenschaft Pseudowissenschaft, ed. par G.L. EBERLEIN. Stuttgart 1991, p.10-11 et 23-70 sous 'Radiasthesie"). 26 Ed. (avec les commentaires de Bhanucandra et Siddhacandra) par K.P. PARAB. Bombay 1890, 433.8. Page #9 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 23 mentionnes cote a cote.27 Pasupata egalement, le brahmane specialiste du Kathasaritsagara et ses acolytes (6.8.69sqq.), qui, pour avoir examine le sol et avoir vu echapper a leurs mains la lampe faite de graisse humaine qu'ils tenaient -- il s'agit apparemment d'un signe (laksana) infaillible , concluent a la presence d'un tresor dans le sous-sol et se mettent a l'exhumer. De Haraprabodha, qui figure - en bonne compagnie - aux cotes d'un visnuite specialiste en presages (sakuna-sarvajna), d'un brahmane astrologue (naksatra-pathaka), et d'un charlatan de bouddhiste, l'auteur de la Yasastilakacampu (XI s.) dit peu de choses: c'est un 'specialiste de l'enfoui' adepte du sivaisme (khanya-vada-vida haraprabodhena jatina).28 L'Inde ancienne n'a pas seule le privilege de ces personnages. Au XIXe s., Ehrmann, un voyageur allemand - manifestement peu acquis a la magie - rapporte: 'Einige Jabesi, Joghi und Fakire, ruhmen sich, zukunftige Dinge vorher sagen, Schatze graben, und Alles, was man nur will, in Gold verwandeln zu konnen.29 Mais il est bien connu qu'on trouve en Inde tout et son contraire et les kh.-v. ne sont pas tous des personnages que l'on pourrait considerer d'un ceil sceptique ou ironique. 2.2.2. Kh.-v. et n.-v. sont egalement l'apanage des rois et des jeunes gens qui ont accompli un cursus complet et maitrisent les arts. A ce titre, les disciplines de l'enfoui figurent parfois, a epoque relativement tardive, dans les listes de kala. C'est alors le terme generique kh.-v. que l'on semble employer de preference: ainsi dans un commentaire du Campuramayana;* dans deux sources jaina apparentees du XIVdeg s. qui enu 27 Voir infra $ 2.2.2, n.33 et n.81; Udayasundarikatha 21.23; UK 60.10-12 (infra SS 4) et 60.12-18 (infra Appendice). 28 Somadevasuri, Yasastilakacampu. Part II. Bombay 1903, 249.20; K.K. HANDIQUI, Yasastilaka and Indian culture. Sholapur 1968, p.39. Les autres versions de l'histoire de Yasastilaka que j'ai pu consulter n'ont pas de passage equivalent. 29 Le temoignage est cite par R. SCHMIDT, Fakire und Fakirtum im alten und modernen Indien. Berlin 21921, p.184. On trouvera de multiples autres cas de 'superstition exploitee par des escrocs promettant la decouverte de tresors caches dans P. DARE, Magie blartche et magie noire aux Indes. Paris 1947, p.40sqq., etc. 30 Cf. A. VENKATASUBBIAH et E. MULLER, 'The Kalas', Journal of the Royal Asiatic Society 1914, p.365: 'khanyavadah' (sic!), ""location and acquirement of buried treasures" (je n'ai pas eu acces direct au texte), et A.S. ALTEKAR, Education in Ancient Page #10 -------------------------------------------------------------------------- ________________ Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) merent les soixante-douze techniques enseignees au roi Ama (Prabandhakosa 28.7 Prabhavakacarita 82.5* [v.65];31 et supra SS 2.1.); et encore dans la liste partielle d'une troisieme oeuvre (de la meme epoque) ou la presence de specialistes de cette discipline, nombreux a Varanasi, contribue a ravir les esprits: dhatu-vada-rasa-vada-khanyavada-mantra-vidya-vidurah purusa[h] ... rasika-manamsi prinayanti.32 La, comme ici, le kh.-v. figure aux cotes d'autres savoirs occultes ou magiques. Comme l'alchimie, son apprentissage est d'ailleurs susceptible de faire partie de la formation d'un fils de marchand. 33 24 2.2.3. Plus encore: si l'on en croit une anecdote humoristique du Kathasaritsagara, qui dit plus qu'il n'y parait, le reperage des tresors (nidhyalokana, KSS 10.5.36; nidhanalokana, 39) pouvait etre un metier, et 'le regardeur de tresor' (nidhana-darsin, nidhana-sthana-darsin, 10.5.36 et 37) - pour reprendre en l'adaptant une expression du Pere Huc34 un professionnel susceptible d'etre employe a la Cour. Le don d'observation est son principal atout, son pouvoir est dans ses yeux. Lorsque donc le roi demande a son ministre de faire en sorte que ce precieux personnage ne quitte pas le royaume, le ku-mantrin -un sot-ne trouve pas d'autre moyen que d'aveugler l'expert, le rendant ainsi incapable de voir les signes du terrain (bhu-laksanany apasyantam, 38) sur lesquels se fonde son savoir.35 India. Varanasi 61965, p.329 (avec references aux Jataka). 31 Rajasekharasuri, Prabandhakosa, ed. (Muni) JINAVIJAYA. Bombay 1935 (Singhi Jain Series 6); Prabhacandracarya, Prabhavakacarita, ed. Muni JINAVIJAYA. Bombay 1940 (Singhi Jain Series 13); B.J. SANDESARA et J.P. THAKER, Lexicographical Studies in Jaina Sanskrit, Baroda 1962, p.57. 32 Vividhatirthakalpa Critically edited ... by JINA VIJAYA. Shantiniketan 1934. (Singhi Jain Series 10) 74.17. 33 Dhatu-vadam khanya-vadam ... ca vasunando 'ty asiksata (LS 6.244); voir BALBIR 1990, SS 10 et infra SS 3.3sq. sur les aventures de ce jeune homme. 34 Il existe en Chine un personnage qu'on appelle le 'regardeur de mines d'or', particulierement qualifie pour la prospection mineralogique: R.-E. HUC, Souvenirs d'un voyage dans la Tartarie et le Thibet pendant les annees 1844, 1845 et 1846. Tome I: La Tartarie. Paris 1962, p.66; cf. infra SS 3.3.4. 35 La version chinoise du Pe-yu-king (Les Avadanas. Contes et apologues indiens inconnus jusqu'a ce jour ... traduits par S. JULIEN. Tome premier. Paris 1859, p.204-206: LVIII. 'Le richi victime de sa vue divine') est moins profane et n'a pas le vocabulaire Page #11 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir. A la recherche des tresors souterrains 25 3. Celui-ci ne fait pas seulement l'objet de mentions sporadiques ou d'anecdotes. A l'instar d'autres domaines plus nobles, il a fait l'objet d'une codification et de regles consignees dans des traites specialises (sastra, pk. sattha), complets ($ 3.1) ou fragmentaires ($ 3.2 et 3.3), elabores dans les milieux brahmaniques ($ 3.1) ou jaina ($ 3.3). L'abondance des textes n'est pas grande, mais les donnees qu'ils contiennent meritent d'etre prises en compte. La popularite de ces preoccupations dans le quotidien et l'imaginaire indiens jusqu'a l'epoque moderne, confirmee, par exemple, par une remarque de l'abbe J.A. DUBOIS, pourrait seule en justifier un examen detaille: au XVIII s., ce missionnaire, releve, en Inde du Sud, l'existence d'un Agrouchada Parikchai, livre de magie qui, notamment, enseigne les secrets pour decouvrir, en se frottant les mains et les yeux avec certaines mixtions enchantees, les tresors enfouis dans la terre ou caches quelque part que ce soit'. 30 3.1. Les sources brahmaniques ont en commun d'avoir peu suscite l'interet des chercheurs, de n'etre pas decrites dans les manuels de litterature et de n'etre pas datables. Il faut, pour en connaitre les noms, se tourner vers le New Catalogus Catalogorum qui recense plusieurs ceuvres apparemment relatives a la chasse au tresor.37 Trois semblent importantes: (i) la Nidhipradipika qui rassemble les chapitres 20 et 21 du Kaksaputa ou Siddhanagarjunatantra, attribue a Nagarjuna l'alchimiste; (ii) la technique precis du texte sanskrit. 36 Mours, institutions et ceremonies des peuples de l'Inde. Paris 1825. Tome II, 2eme partie, chap.XXI (Magie), p.57 et 59-60. Aucune des editions ou traductions de cet ouvrage ne porte de note qui aiderait a identifier l'Agrouchada Parikchai (sk. ...qusadhapariksa?). Sur le recours aux collyres magiques (siddhanjana) dans la chasse au tresor, voir supra SS 1 et infra SS 3.1. 37 New Catalogus Catalogorum. An Alphabetical Register of Sanskrit and Allied Works and Authors. Volume Ten (na-nva). Ed. K. KUNJUNNI RAJA. Associate Ed. C.S. SUNDARAM. Madras 1978, p.129-130 (s.v. nidhideg; mais rien s.v. khanya": vol.5. Madras 1969). - Il faudrait egalement considerer la litterature des Tantra, dont plusieurs s'interessent au sujet, comme me le rappelle M. Meulenbeld. Les principales references sont commodement rassemblees dans T. GOUDRIAAN, Maya Divine and Human. A study of magic and its religious foundations in Sanskrit texts, with particular attention to a fragment on Visnu's Maya preserved in Bali. Delhi 1978, p.261 et 307. 38 Les manuscrits du Kaksaputa ne semblent pas tous contenir le meme nombre de chapitres (cf. T. GOUDRIAAN, Hindu Tantric and sakta Literature. Wiesbaden 1981, p.117-118): vingt-trois dans les manuscrits recenses dans le New Catalogus et ceux Page #12 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 26 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) ge de la Nidhir Sabara' (4.67). ; a compile en ut 2Nidhipradipika en vingt-huit chapitres, extraite du Siddhasabaratantra; et (iii) le Nidhipradipa. Seul ce dernier est edite;39 seul il retiendra ici mon attention. Il s'agit d'un compendium (sara, v.1) en quatre chapitres et 383 anustubh (auxquels s'ajoute une serie de mantra dans le chap.3) que l'auteur, un certain Siddha-Sri-Kanthasambhu, a compile en utilisant notamment le 'traite expose par Sabara' (4.67). Le NP est donc probablement un abrege de la ?Nidhipradipika susnommee. La provenance des manuscrits existants tendrait a prouver qu'il etait plutot en usage dans l'Inde du Sud, probablement a une epoque relativement peu ancienne (Moyen Age?). Destine a delivrer de la pauvrete (daridrya, 1.3; 1.10; etc.) et a rendre son utilisateur 'riche comme Cresus' (Kubera-sadesah, disent les Indiens, NP 1.11), il est mis dans la bouche de Sambhu, qui, interroge par de malheureux ssi, va leur exposer ce 'traite des tresors, mysterieux et inaccessible meme aux dieux' (nidhi-sastram idam guhyam tridasair api durlabham, 1.9). Trace en quelques strophes (1.11-18), le plan de l'ouvrage est suivi assez rigoureusement, et le passage d'un sujet a un autre indique au moyen de versets transitionnels (type: pravaksyami ... /... maya proktam ...). Le developpement est fait a la fois de considerations generales de type deontologique ou astrologique, banales en Inde, et de prescriptions topiques. La langue est un sanskrit coulant, mais quelquefois incorrect (voir specimen infra n.40-41); le style est simple et assez monotone. Le chasseur de tresor doit etre accompagne d'acolytes dont les caracteristiques sont d'abord definies (sahaya-laksana, 1.19-26ab): leur conduite et leur moralite seront irreprochables. Un certain nombre de presages favorables laissent bien augurer de la decouverte (sunimitta, auxquels avait eu acces P. Cordier (G. LIETARD et P. CORDIER. Travaux sur l'histoire de la medecine indienne. Documents reunis et presentes par A. ROSU. Paris 1989, p.413); vingt dans les manuscrits conserves au Wellcome Institute (Londres) et analyses par D. WUJASTYK ("An alchemical ghost. The Rasaratnakara by Nagarjuna': Ambir 31.1984, p.75): cette recension a un seizieme chapitre intitule Nidhigrahanam. 39 Infra: Abreviations (NP). Il s'agit d'une edition brute, sans introduction. Le New Catalogus Catalogorum decrit ainsi le NP: 'On exhuming the hidden treasures. by [sic] Siddha Srikantha Sambhu. Seems to be a condensation of the large texts Nidhipradipika'. Dans ces conditions, on voit mal pourquoi S. JHA, le traducteur de la Geschichte der indischen Litteratur de M. WINTERNITZ, le mentionne a la suite des traites de niti dans l'History of Indian Literature (Vol.III/2. Scientific Literature. Delhi 1967, p.606). Page #13 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 1.26cd-32ab). Il faut au contraire se mefier de quelques signes nefastes (asubha, 32cd-33). Le mieux est de s'en remettre a l'astrologie pour decider du moment favorable a l'entreprise (tithi-naksatra-varanam muhurta, 34-45). Il est egalement important que les acolytes respectent certaines contraintes de comportement (niyama, 46-50). D'une maniere generale, on est susceptible de trouver des tresors dans plusieurs endroits (nidhi-sthana, 2.1sqq.) situes soit en milieu aquatique (2.1cd-2a), soit en milieu terrestre (2.2b-8ab), soit en milieu aerien (8cd-9). Encore faut-il connaitre les caracteristiques favorables (laksana) propres a chacun. Ici apparait une hierarchie (fondee sur le bon sens?): la discussion des caracteristiques du milieu terrestre (2.13cd-71) occupe nettement plus de place que celle des deux autres (respectivement 2.10-13ab et 72-95). Parmi les sites favorables, figurent en bonne place le pied des grands arbres, les arbres a faite unique (eka-sirsa), les forets et les hauteurs (maha-vrksasya mulake, eka-sirsesu vrksesu vanesucca-sthalesu ca, 2.5bd). Les indices dont il convient de tenir compte sont, outre la presence d'une faune particuliere (quadrupedes, oiseaux, insectes, 27cd-38), et d'un grand nombre de signes extraordinaires (39-71), la nature du sol et .de la vegetation (14-27ab): 'Sont maintenant definies les caracteristiques des arbres, des arbrisseaux et des lianes. Un arbre sans fleur et un arbre en fleurs, un arbre portant des fruits et un arbre n'en portant pas . et un arbre non epineux indiquent la presence de quelque chose dans la terre. Une fleur au-dessus d'une fleur indique aussi la presence de quelque chose dans la terre. Un arbre dont les feuilles, les fleurs, les fruits ou les bourgeons sont spontanement anomaux indique la presence de quelque chose dans la terre. La taille des feuilles aussi [peut l'indiquer]. Des gouttes rouges coulant, meme naturellement, d'un arbre et le bruit d'un echo indiquent aussi la presence de richesse. Si le surgeon est juste visible, il faut savoir qu'il y a un tresor. C'est indeniable. Si le tour de ce surgeon mesure un angula, on trouvera une fortune.>>40 40 vrksa-gulma-latadinam laksanam tu vidhiyate: a-puspas ca sa-puspas ca a-phalah sa-phalas ca ye a-kantakas ca ye vrksa bhaumeyam tatra nirdiset. puspoparistat puspam ca bhaumeyam tatra nirdiset. svabhavad viparitais ca patra-puspa-phalankuraih 27 Page #14 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 28 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) La quantite d'argent trouvee est fonction des dimensions de ce surgeon. Pour plus de commodite, je resume les donnees chiffrees des strophes suivantes sous forme d'un tableau. Dimension du tour du surgeon Quantite de richesse ... 6 (?) 500 16 1 000 20 [100 000 30 100 000 Au-dela 10 000 00041 Par ailleurs, la position d'une image divine (bimba, pratima, 2.109sqq.) peut egalement tenir lieu d'indice. Un examen approfondi (pariksa, 3.1sqq.) de toutes les conditions et de tous les signes precedemment repertories est indispensable au succes de l'entreprise. D'autres moyens magiques dont dispose le chasseur de tresor sont ensuite passes en revue. En suivant les recettes du NP, il doit pouvoir preparer diverses pates (varti,42 3.56cd-91) a base d'huile (taila), de graisse (vasa) et de racines, ou mettre au point divers collyres ou onguents (anjana, 3.92135), a partir de mineraux (orpiment, realgar, etc.) habilement melanges a certaines autres substances. Il va sans dire qu'il lui faudra, a differents moments, prononcer les formules appropriees (mantra, p.32-37). Enfin, au moment de s'emparer du tresor (nidhi-sangrahana, 4.1-30), il lui drumah parna-pramanais ca bhaumeyam tatra nirdiset. svabhavad api vTksasya sravanto rakta-bindavah visrutah pratisabdas ca tatra vittam vinirdiset. druma-pramanair a-vrksat praroham yatra muncati prarohe drsta-matre tu vasu vidyad asamsayam. ekangula-parinahe prarohe labhate dhanam. (NP 2.19-24ab) 41 (dvatrimsad iti va prsthe pancapancasate 'pi va; sasthy-arthe 'ngu-parinahe vidyat pancasatam dhanam.] (Le texte ci-dessus est corrompu; la logique des correspondances numeriques semble perturbee.) sodasangulike jneyam sahasrarn natra samsayah. vimsaty-angulike vidyat sahasrani bahuni ca; trimsad-angulike jneyam sahasranam fatam vasu; atah param pravsddhe tu kotim tatra vinirdiset. (NP 2.24cd-27ab) 42 J. FILLIOZAT (Yogasataka. Pondichery 1979, p.vii, n.1) definit ainsi ce mot: 'Varti designe un batonnet enduit d'une pate roulee sur une tige rigide.' Page #15 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains faudra rendre propices par des offrandes (bali; infra SS 4) les nombreuses divinites susceptibles de s'opposer a son entreprise, et renouveler ces offrandes pour assurer la protection de la richesse acquise au prix de tant d'efforts (nidhi-raksa-vidhi, 4.31-66). 29 3.2. A date ancienne, on trouve, conservees dans telle strophe isolee, des bribes de l'enseignement qu'un traite de cette nature dispense systematiquement. 3.2.1. Traitant de sourcellerie, le cinquante-troisieme chapitre de la Brhatsamhita (= BS) de Varahamihira (circa 550), considere a deux reprises la quete des tresors: a-trne sa-trna yasmin sa-trne trna-varjita mahi yatra tasmin sira pradista, vaktavyam va dhanam casmin kantaky a-kantakanam vyatyase 'mbhas tribhih karaih pascat khatva purusa-tritayam tribhaga-yuktam dhanam va syat (BS 53.52-53)43 'Que dans un endroit non herbeux la terre soit herbeuse, qu'elle soit sans herbe dans un endroit herbeux, indique la une veine aquifere; ou bien cela veut dire qu'il y a la une fortune. Qu'il y ait un epineux au milieu de non epineux, et vice versa, si on creuse a trois coudees a l'ouest, a 3 toises44 3/4 [de profondeur], il peut y avoir de l'eau, ou bien une fortune.' Qu'il s'agisse de l'une ou de l'autre, la demarche est manifestement identique, et les memes signes valent pour la detection de tous les tresors enfouis dans le sol. Deja rencontrees plus haut pour indiquer la presence de nidhi, l'inclinaison marquee des branches d'un arbre, ou, autre exemple d'anomalie, la modification inattendue de la couleur d'une fleur, signaleront ici la presence d'eau souterraine (BS 53.49 et 55; 57-58). 43 Ed. avec le commentaire d'Utpala (voir supra, n. 24), p.635-636. Utpala est silencieux sur le point qui nous occupe. Ces deux strophes sont egalement citees dans la Sargadharapaddhati 2201-2202 (ed. P. PETERSON. Bombay 1888. Bombay Sanskrit Series 37). 44 Un purusa (equivalent, selon les textes, a 120 angula ou moins) correspond a la taille d'un homme aux bras allonges: cf. S. SRINIVASAN, Mensuration in Ancient India. Delhi 1979, p.19. Pour angula (et hasta = kara) cf. aussi DAS, p.169 et 518. Page #16 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 30 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) 3.2.2. Echappee de quelque traite pour devenir bien commun, ou digne d'y figurer, voici encore une strophe a peu pres de la meme epoque (VIdeg s.). Elle est citee par Simhasuri (VIdeg s.?), commentateur du Dvadasara-nayacakra, important ouvrage philosophique du au jaina Mallavadin (IV s.?): a-kantakah kantakinah kantakas capy a-kantakah viparyayena dssyante vadanti nidhi-laksanamos 'Que, contrairement (a la normale), on voie les non epineux transformes en epineux, et les epineux transformes en non epineux, voila un signe caracteristique indiquant la presence d'un tresor.' L'observation des anomalies est un indice auquel les specialistes du n-v. ont volontiers recours: pensons a Bana evoquant dans le Harsacarita les 'modifications de comportement des arbres' (taru-vikara: supra SS 1); ou au Nidhipradipa: a-ksirah ksira-vsksas ca sa-ksirah ksira-varjitah viparita-phalodbheda drsyante yatra bhuruhah avasyam tatra vittam syat (NP 2.42-43a). Contenu, style et vocabulaire ont une parente frappante. 3.3. Si l'on excepte le cinquante-cinquieme chapitre de l'Angavijja, consacre aux tresors, mais en definitive peu exploitable, et un Nidhanadipariksasastra recense dans les catalogues de manuscrits mais inaccessible, les jaina ne semblent pas avoir conserve de traite en bonne et due forme.46 Mais, a date relativement ancienne (VIII s.), on lit quelques passages didactiques, en vers ou en prose, en prakrit maharastri jaina (a, c, e), en apabhramsa (d) ou en sanskrit (b, f) inseres, plus ou moins adroitement, dans les six romans suivants: 45 Dvadasaram Nayacakram of Ac. Sri Mallavadi Ksamasramana. With the commentary Nyayagamanusarini of Sri Simhasuri Gani Vadi Ksamasramana. Part I (1-4 Aras). Ed. with critical notes by Muni JAMBUVIJAYAJI ... . Bhavanagar 1966, 223.13*-14*. Cette reference est indiquee par Das, p.129. 46 Angavijja (Science of Divination through Physical signs & Symbols). Ed. by Muni Shri PUNYAVIJAYAJI. Banaras 1957 (Prakrit Text Society Series 1): nidhan'ajjhao, p.213214; conserve au Dela no bhandar (Ahmedabad), le Nidhanadipariksasastra, egalement intitule Ahicakra, contient trois feuillets: cf. Jaina Granthavali. Bombay 1909; New Catalogus Catalogorum (loc.cit. supra, n.39) et H.D. VELANKAR, Jinaratnakosa An Alphabetical Register of Jain Works and Authors. Vol.I. Works. Poona 1944, p.212. Page #17 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 31 (a) Kuvalayamala d'Uddyotanasuri (achevee en 779; 104.21sqq.); abrege sanskrit de Ratnaprabhasuri (XIII s.; *46.1sqq.); (b) Upamitibhavaprapanca Katha de Siddharsi (achevee en 805; 865.7*sqq.); (c) Puhaicandacariya de Santisuri (achevee en 1105; 119.23sqq.); (d) Akhyanakamanikosavrtti d'Amradeva (XII s.; 137.6*sqq.); (e) Manoramakaha de Vardhamanasuri (XII s.; 114.13sqq.);47 (f) Lilavatisara de Jinaratna (XIII s.; 6.182sqq. et 391sqq.). Dans la Kuvalayamala, l'Upamitio et la Manoramakaha, en particulier, les strophes visees ont fortement l'allure de citations qui pourraient avoir ete extraites d'un traite specialise aujourd'hui hors d'atteinte, en sorte que Vardhamanasuri n'hesite pas a employer le terme de sastra (jao bhaniyam satthe, MK 114.14) pour les introduire. Quant a Uddyotanasuri, on connait maintenant son gout pour les exposes d'allure technique et sa maniere. On l'avait vu initateur des exposes d'alchimie;48 on le retrouve donnant le ton des exposes de kh.-V., manifestement imites par ses successeurs (Siddharsi et Vardhamanasuri, notamment). D'un roman a l'autre, les scenarios dans lesquels prend place la theorie sont analogues: un jeune homme de milieu marchand, devenu pauvre a la suite de diverses mesaventures, rencontre des 'specialistes de l'enfoui' (ditthaya kayai tena khanna-vaino, PC 119.23) ou un ascete non jaina (parivvayaga, MK) qui pretendent l'aider et lui communiquent leur savoir; beneficie, sans se faire connaitre, de l'enseignement dispense par un maitre connaisseur a ses eleves (ditthu ekku ujjhayavaru ... khannavaya-vakkhana-paru, AMKV 137.6*-7*); ou, de lui-meme, remarque au cours de son errance a travers forets et montagnes un arbre dont la configuration attire l'attention (Km, UK, LS; AMKV). C'est alors pour lui l'occasion de se rememorer ce qu'il sait du khannavaly)a - et pour nous celle de voir quels enseignements livrent les textes. Effet du contexte, ou point de vue theorique, la seule methode preconisee pour localiser l'emplacement d'un tresor souterrain est ici l'observation botanique. Si les jaina en ont connu d'autres, elles restent a decouvrir. Pour l'heure, il n'y a entre ces sources et le NP (supra $ 3.1) pas de concordance litterale, mais bien des differences. Il reste un 47 La seule edition disponible (infra: Abreviations) n'est pas entierement satisfaisante. Plusieurs points restent obscurs (infra). 48 BALBIR 1990 et BALBIR 1992. Page #18 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 32 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) air de famille qui accredite l'idee qu'il a existe un savoir pan-indien de l'enfoui. 3.3.1. Plus que l'arbre lui-meme, c'est la presence d'un surgeon qui semble signaler l'existence d'une richesse souterraine. La proliferation visible est probablement l'indice d'une proliferation invisible a decouvrir: on se rappelle que, selon le NP, la taille du tresor est fonction de la taille de ce surgeon. Inversement, la croissance des arbres passe egalement pour etre favorisee par la presence de tresors, qui peut remedier aux deficiences eventuelles du terrain: nidhi(-deva-mahipanam) prabhavac cati-yatnatah a-satmya-bhumi-sampanna api sidhyanti padapah (Vrksayurveda v.44: DAS, p.128-129). Les textes jaina nomment banalement ce surgeon paroha (MK; sk. praroha: UK; praroha: Km en sk.; NP, supra SS 3.1; Bana SS 1) ou pota (LS). Mais ils emploient aussi, dans les memes contextes, les termes apparemment plus techniques paya et payaa (Km, PC, AMKV; SK supra SS 1), occasionnellement rendus en sanskrit jaina par padaka.50 Pour peu que l'arbre soit designe par payava (sk. padapa), l'ambiguite devient possible: la difference phonetique minime entre les deux termes (paya(y)a - padaka et payava - padapa) peut disparaitre, comme le prouvent la presence de variantes sporadiques et quelques flottements (infra SS 3.3.3 et 3.3.6). Quoi qu'il en soit, une condition est requise: que ce surgeon, de preference de grosse taille (infra, SS 3.3.6), penetre bien sous terre. Tous les textes insistent sur ce point (praroho bhumi-sampraptah, UK 865.9*; payao dharanim anupavittho, PC 119.27sq., 29; payau jai mahi-gau hoi, AMKV 137.8*,... mahi-pavitthu, 13*; dharaniyala-pavittha...-parohoopayavo, MK 114.13sq.; potam bhu-pravistam, LS 6.182b). La raison n'est pas donnee, mais il est probable qu'est ainsi assure le contact entre le sol et les puissances souterraines supposees garder les tresors enfermes dans le sous-sol, entre les mondes visible et invisible. Comme on le 49 Meme hesitation sur la quantite vocalique en sanskrit (praroha) malgre ce que semble suggerer R. PISCHEL, Grammatik der Prakrit Sprachen. Strassburg 1900, SS 70. 50 Samaradityasamksepa 3.44 traduisant SK 138.11-12 (citee supra SS 1). Le terme ne semble pas connu hors des textes jaina inspires d'originaux en moyen-indien. Le PSM ne recense pas les formes prakrites. 51 Padave, v.l. padaye (Km 104.25*); payao, v.l. payavo (PC 119.27). Page #19 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 33 verra, le contact de l'homme avec ce monde est loin d'etre sans danger (infra SS 4). 3.3.2. Contrairement au compilateur du NP, Uddyotanasuri et ses successeurs attachent une importance particuliere a la determination des especes d'arbre pouvant servir d'indice. A) En effet, toutes ne sont pas bonnes. La premiere information est negative: les arbres a latex sont exclus, precise la Km, suivie par la MK, l'UK et reprise par le LS (aksirino hi vrksasya, 6.183a), tandis que les autres textes (PC, AMKV) restent silencieux sur ce point. mottuna khira-rukkhe jai anna-dumassa payao hoi, janejjasu tatth'attho atthi mahanto va thoo vva (Km 104.23*) 'Mis a part les arbres a latex, s'il y a surgeon d'un arbre (d']autre (espece), sache-le, c'est qu'il y a la quelque chose d'interessant - en grande ou en petite quantite.' Comme souvent dans ce passage, la MK suit manifestement la Km, mais use - sans doute volontairement - d'une formulation plus contournee, jouant sur une double negation; tout en gardant les termes essentiels, l'UK a une formulation personnelle: (nunam asty atra kincid dhana jatam) khira-rahiyassa taruno nasty eva ksira-vsksasya paroho na dhana-vajjio hoi praroho dhana-varjitah (MK 114.15*ab) (UK 865.13*) 'Le surgeon d'un arbre sans latex n'est pas sans richesse.' Pk. khira-rukkha (sk. ksira-vsksa) et ses avatars (ex. khira-dduma, etc.) sont des termes generiques. Le groupe qu'ils designent comprend les differentes varietes de figuier (nyagrodha, asvattha, plaksa, udumbara, kakodumbari, etc.). Une raison simple, fondee sur l'observation, pourrait expliquer leur exclusion ici: la presence de surgeons ne peut etre significative que si elle est extraordinaire. Or les nyagrodha et autres ksiravsksa en sont normalement abondamment pourvus." Il faut, d'autre part, tenir compte d'eventuelles croyances. Or, d'une maniere generale, 52 Sur ce que designe artha, voir infra $ 3.3.4. 53 Voir, par exemple, M.B. EMENEAU, 'The strangling figs in Sanskrit literature: University of California Publications in Classical Philology 13.1949, p.545-570 = Sanskrit Studies of M.B. Emeneau. Selected Papers. Ed. by B.A. VAN NOOTEN. Berkeley 1988, p.11-27 (en particulier 12 et 22). Page #20 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 34 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) ces arbres ont stimule l'imagination indienne, et les temoignages rassembles par T. ZACHARIAE et J.J. MEYER montrent qu'elle les a dotes de pouvoirs magiques, benefiques ou malefiques selon les circonstances.54 Mais, dira-t-on, y a-t-il, en Inde, beaucoup d'arbres dont on ne pourrait dire la meme chose? Ils ont en outre eveille la mefiance des jaina, qui interdisent la consommation de leurs fruits a leurs adeptes car, meme secs, ils contiennent une infinite de graines et donc d'etres vivants.55 Plus topique est peut-etre la croyance attestee sporadiquement, au detour de tel texte d'arboriculture ou d'architecture, selon laquelle arbres a latex (ksira, payas 'lait') et richesse semblent faire mauvais menage. Il convient ainsi d'eviter d'en planter au voisinage d'une habitation, car, est-il dit dans le Vrksayurveda de Surapala, 'les arbres a latex ont pour resultat la perte d'argent'.56 Fort a propos, R.P. DAS, l'editeur de cet ouvrage, allegue aussi le pada suivant, emprunte a un traite moderne (XIX s.) qui va dans le meme sens: sadugdha-vrksa dravinasya nasam kurvanti; et propose une hypothese susceptible d'expliquer cette idee: 'Was latexhaltige ("milchhaltige") Pflanzen und Reichtum betrifft, so mag man in Milch ein Sinnbild fur Reichtum gesehen haben (Milch impliziert Kuhe, und diese wiederum sind ein Zeichen von Wohlstand); dann konnte oben gemeint sein, dass die Pflanzen diese "Milch" von der Wohnstatte wegziehen, um sie selber zu verwerten' (p.107; p.513: selon l'Atharvaveda, recension Paippalada 19.52.5 payas symbolise la richesse). DAS remarque encore: 'Andererseits kann "Milch"... auch fur "mannliche Samenflussigkeit" stehen ...; da Nachkommen... altindischer Denkweise gemass auch Reichtum bedeuten, ware zu prufen, ob latexhaltige Pflanzen nicht vielleicht fruchtbarkeitsraubend wirken sollen.' Quelle qu'en soit l'origine, l'incompatibilite entre cette variete d'arbre et tout espoir de fertilite semble assez bien etablie. 54 T. ZACHARIAE, 'Einen Scheidenden bis an ein Wasser begleiten': Zeitschrift fur Indologie und Iranistik 5.1927, p.228-240 Opera Minora, hrsg. von C. VOGEL. Wiesbaden 1977, Teil 2, p.835-847, et plus particulierement p.838sqq.; J.J. MEYER, 'Einen Scheidenden bis an ein Wasser begleiten', ZII 7.1929, p.71-88, et plus particulierement p.75-84; voir encore W. CROOKE, The Popular Religion and Folklore of Northern India, 21896, reimpr. Delhi 1968, vol.2, p.97sqq. et M.-C. MAHIAS, Delivrance et convivialite. Le systeme culinaire des Jaina. Paris 1985, p.102. = 55 Voir, par exemple, R. WILLIAMS, Jaina Yoga. A survey of the Mediaeval Sravakacaras. London 1963, reimpr. Delhi 1983, p.53; M.-C. MAHIAS, loc.cit. 56 Ksirino 'rtha-nasaya, v.31: DAS, p.105. Page #21 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 35 B) Une fois elimines les arbres a latex, il reste, theoriquement, un grand nombre d'especes possibles. On a ainsi deja vu mentionnes le pomada et le naliera (supra SS 1). Les textes jaina d'allure didactique ici examines ne le nient pas, mais, lorsqu'ils en viennent a une definition positive, le manque de variete est frappant. Tous affirment leur preference pour le bilva et le palasa, apparemment consideres comme garantissant infailliblement la decouverte recherchee. Certains invoquent un pada pair d'anustubh, dont la langue d'origine est clairement le sanskrit. C'est ainsi en sanskrit que le cite le PC, par ailleurs redige en prakrit: dhruvam bilva-palasayoh 'Absolument certaine [la presence d'un tresor) dans le cas d'un b. ou d'un p.' (PC 119.28* = UK 865.14* = LS 6.184d). Dans ces conditions, quand la Km (104.24*) introduit comme une citation (jena bhaniyam) la sequence dhuvam billa-palasayo, il faut evidemment y voir une prakritisation mecanique du syntagme sanskrit correspondant. Le metre (anustubh, et non arya comme les strophes originales du texte) et la morphologie le prouvent: comme l'avait bien suppose UPADHYE, la finale -ayo est clairement un vestige de genitiflocatif duel et le verset provient probablement d'un quelconque traite sanskrit (non identifie) sur le kh.-v. Frequent dans tous les ouvrages consacres a l'interpretation des signes et a la divination, l'emploi d'un adverbe asseveratif (dhruvam) n'est pas pour surprendre. Meme si elles ne citent pas ce verset, les autres sources jaina ne disent pas autre chose: jahim billa-palasaha taruvaraham payau 'La ou un surgeon des excellents arbres que sont le b. et le p. ...' (AMKV 137.8*). Et de meme la MK, qui semble ajouter une correspondance entre l'abondance du tresor et l'ombre qu'il y a sous ces arbres: chaya va bhuri tattha ya billa-palasesu puna niyama (MK 114.15*cd).58 57 Notes, p.*141: 'Is billapalasayo a form of the gen. dual (= bilvapalasayoh)? 36 Chayam va, ed. - Le texte parait incertain: tattha fait double emploi avec le locatif. Faut-il lire attha precede d'un t- euphonique (cf. Km 104.23* et 25*: $ 3.3.2 supra et 3.33)? On comprendra alors: 'Normalement, en revanche, il y a, a coup sur, ombre et abondance de tresors sous les b. et les p.' Page #22 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 36 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) Ainsi va la theorie. Dans les recits environnants, qui en constituent une application directe et sans grande fantaisie, c'est egalement l'une ou l'autre de ces deux especes d'arbre qui retient l'attention des jeunes heros: le bilva, (billa, AMKV 137.13*), eventuellement designe par ses synonymes les plus courants malura (Km 104.21) et sriphala (Km en sk. *46.2),59 ou le palasa (PC 119.27; MK 114.13; LS 6.182 et 391; kimsuka, UK 865.7*). Les raisons de ces choix ne sont nulle part donnees. Les deux especes, relativement communes en Inde, sont bien reconnues par les botanistes qui identifient le bilva a l'Aegle marmelos Linn., et le palasa au Butea monosperma (Lam.) Taub. ou Butea frondosa Roxb., encore appele dhak dans l'usage courant. Qu'il s'agit d'arbres que toute la tradition indienne considere comme notoirement fastes et sacres est clair: leur bois est abondamment utilise dans le rituel brahmanique et la vie religieuse.61 Mais hormis le fait que le bilva est lie a Laksmi,62 donc a la richesse et a la prosperite (cf. le synonyme sri-phala), il est difficile de voir ce qui a pu conduire a etablir un lien privilegie entre ces arbres et la richesse du sous-sol qu'ils couvrent. 3.3.3. Une fois determinee l'espece, encore faut-il que l'arbre choisi ait. les caracteristiques adequates. La quantite de richesse enfouie depend de sa taille: 'Mince est l'arbre, petite sera la richesse; a gros arbre, richesse abondante': -tanuyammi hoi thovam thulammi ya padave (v.l. padaye) bahum attham (Km 104.25*ab) -thulammi hoi pauram tanue tanuyam dhanam parohammi (MK 114.16*ab) 59 Tous deux figurent a ce titre dans les lexiques: Amarakosa 2.4.2.12 et Abhidhanacintamani 1135, cites par R. SYED, Die Flora Altindiens in Literatur und Kunst. Inaugural-Dissertation zur Erlangung des Doktorgrades der Philosophie an der Ludwig-Maximilians-Universitat zu Munchen. (Munchen) 1990, p.467. Voir aussi DAS, p.74. 60 Voir respectivement DAS, p.74, R. SYED (op.cit.), p.475-477 et DAS, p.84. 61 Voir, pour le bilva, les nombreux passages commodement rassembles dans SYED, p.467-469; pour le palasa, la description de W. CROOKE (op.cit. supra, n.54), p.111-112 et l'allusion de J.J. MEYER (op.cit. supra, n.54), p.76. 62 Surapala, Vyksayurveda v.10: Das, p.74. Page #23 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains - prarohe bhuri tat sthule tanuke stokam ucyate (UK 865.15*). On le voit: ici encore, les formulations de l'UK et de la MK sont proches de celle de la Km, a une modification pres dans l'ordre des mots, tandis que ce point de l'expose n'est pas aborde dans les autres sources (PC, AMKV, LS). On retrouve, d'autre part, le flottement habituel: la regle concerne l'arbre dans la Km, le surgeon dans l'UK et la MK. En bonne logique, le heros de l'UK qui avait remarque un surgeon plutot mince (krasiyan, 865.9*) en conclura donc que la richesse enfouie au pied du palasa est peu considerable (866.1-2). Il n'empeche qu'il trouvera un recipient de cuivre contenant mille dinara (866.6sqq.). Km, UK et MK, qui puisent manifestement a une source d'inspiration commune, prennent encore en compte un autre facteur susceptible d'indiquer l'importance du tresor existant: -rayanie jalanamane bahuyam thovam tu umhale (Km 104.25*cd) -paurammi jalai dharani rayanie unhiya thova (MK 114.16*cd) - ratrau jvalati tad bhuri sosmani svalpam iritam (UK 865.16*). Le detail syntaxique n'est guere transparent. Mais l'idee generale apparait: abondante sera la richesse si le surgeon (ou le sol) brille la nuit; peu abondante si le surgeon (ou le sol) est chaud, c'est-a-dire peutetre desseche (suce?: cf. les remarques de DAS, supra $ 3.3.2A). Elle trouve comme un echo dans plusieurs versets du NP, qui, sans dire exactement la meme chose, montrent au moins la vogue de pareilles considerations. 3.3.4. La nature de la richesse trouvee sera fonction de la couleur, - la couleur du suc de l'arbre, precise seul l'AMKV (rasa, 137.10*-11*). Sauf a voir en tout cela pure fantaisie, la couleur doit probablement dependre de l'espece de l'arbre. On sait, par exemple, que le palasa laisse exsuder un liquide (une gomme) de couleur rouge. 3 Ed. jala-samane (?), v.l. jalanamane: forme pseudo-participiale sur le theme verbal jala- (sk. Vjval), cf. MK jalai? 64 valli grha-pradese tu ratrau prajvalita yadi (... tatra vittam nirdiset), NP 2.64cd; grisme suryamsubhir dagdha sosam nayati ya mahi (... nidhanam tatra laksayet), NP 2.47ab. S P.N.V. KURUP, V.N.K. RAMADAS, S.P. JOSHI, Handbook of medicinal plants. New Delhi 1979, p.156; ubi alia. Page #24 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 38 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) Pour la premiere fois, on apprend de quelle 'richesse' il va s'agir. Le vague attha (sk. artha), jusque la seul employe dans la Km (supra, $ 3.3.2), est remplace par des termes designant des mineraux: l'or, l'argent, le rubis, laissant entendre que le khanya-vada touche aussi bien a la recherche des gisements miniers (cf. sk. khani 'mine'). Or l'observation de la correlation entre certaines plantes et les gisements est une methode averee de la prospection mineralogique. Apparemment inconnue des sources de l'Antiquite classique,67 elle est attestee de longue date en Chine, comme en temoigne le texte suivant ecrit aux alentours de 800: 'Quand il y a dans les montagnes la plante cong (Allium fistulosum) on trouvera en dessous de l'argent. Quand il y a la plante xiai (Allium bakeri) on trouvera en dessous de l'or. Quand il y a la plante jiang (Zingiber officinale) on trouvera en dessous du cuivre et de l'etain. S'il y a dans la montagne du jade, les branches des arbres environnants seront penchees'. 68 Toutes les sources jaina sont d'accord sur les correlations que la Km est la premiere a etablir. Elles reposent sur le principe bien connu de la 66 Cf. Arthasastra 2.12.1-2. 67 Si l'on en croit R.J. FORBES, Studies in Ancient Technology. Vol. VII. Leiden 1966, p.109-115: 'We have no indication that such connections between vegetation and underground mineral deposits were recognized by the inhabitants of the Mediterranean world' (p.115). 68 Extrait du Yo yang za zu de Duan Cheng-shi cite par FORBES, op. cit., p.115, suivant J. NEEDHAM, Prospection geobotanique en Chine medievale': Journal d'agriculture tropicale et de botanique appliquee 1 (mai-juin 1954) = La tradition scientifique chinoise. Paris 1974 (Coll. Savoir), p.123 (121-126); et Science and Civilisation in China ... . Vol.3. Mathematics and the sciences of the heavens and the earth. Cambridge 1959, p.673-680. La methode a persiste et semble une specialite chinoise. Au XIXe s., le Pere HUC relate comment les Chinois procedent a l'exploitation sauvage des mines d'or du Gechekten: 'Il existe des hommes qui ont une capacite remarquable pour decouvrir des mines d'or; ils se guident, dit-on, d'apres la conformation des montagnes et l'espece des plantes qu'elles produisent (op.cit. supra, n.34, p.65sqq.). En Europe, pareilles observations ont notamment ete faites par Martine de Bertereau (XVII s.): 'Il y a cinq regles methodiques qu'il faut savoir pour connaitre les lieux ou croissent les metaux: ... la seconde, par les herbes et les plantes qui croissent dessus' (cite Y. ROCARD , p.44). L'analyse des composants chimiques des vegetaux permet de rendre compte de ces correspondances. Page #25 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 39 magie sympathique, selon lequel 'le semblable appelle ou engendre le semblable"69. viddhammi ei rattam jai pae to bhavejja rayanaim aha chiram to rayayam; aha piyam to bhave kanayam (Km 104.27*) 'Si une fois le surgeon perce il vient du rouge sang, ce sera des rubis. Si c'est du blanc de lait (= sk. ksira), de l'argent, et si c'est du jaune, alors ce sera de l'or.' Les termes employes pour designer ces substances sont tantot communs, tantot plus rares (UK 865.17*-18*; PC 119.29-30; AMKV 137.10*-11*; MK 114,17*; LS 6.183cd). Ainsi, Jinaratna, l'auteur du LS, a choisi d'employer pour 'or' et 'argent les vocables pita et sita, propres aux lexiques specialises," qu'il utilise egalement pour designer les couleurs jaune et blanche. Il devait juger savoureux l'espece de yamaka qui en resulte (pite pitam, site sitam 6.183d). Voici, pour eviter une accumulation superflue, un tableau rassemblant les termes des autres textes: a) exsudat rouge (ratta; sk. rakta) - rubis (rayana; sk. ratna) b) exsudat blanc (sia, PC; dhavala, AMKV, khira, ksira, UK = MK = Km) - argent (ruppaya, PC, kalahoya", AMKV; ruppa, rupya UK = MK) c) exsudat jaune (pia, PC, AMKV, MK) - or (kancana, PC, AMKV, kanaga, kanaka UK = MK"). 69 J. FILLIOZAT, Magie et medecine. Paris 1943, p.91; Encyclopaedia of Religion and Ethics ed. by J. HASTINGS. Vol.4 (Edinburgh 1911) p.776a, vol. 10 (Edinburgh 1918) p.225b, et Index (s.v. "Sympathetic magic'); The Encyclopaedia of Religion (ed. by M. ELIADE). Vol.9 (New York 1987), p.90b. 70 Dans le contexte, cette traduction parait plus coherente que ne le serait celle par joyaux, pierres precieuses'. Ratna designe volontiers le rubis dans les lexiques specialises: ex. R. GARBE, Die indischen Mineralien, ihre Namen und die ihnen zugeschriebenen Krafte. Narahari's Rajanighanu Varga XIII. Sanskrit und Deutsch ... herausgegeben von ... . Leipzig 1882, v.147. Sur les gites du rubis, voir L. FINOT, Les lapidaires indiens. Paris 1896, p.XXXVIII. 71 Dictionnaire de St. Petersburg, s.v.; R. GARBE, op.cit., v.9 (or) et 15 (argent). 12 = sk. kaladhauta, R. GARBE, op.cit., v.15. 73 MK 114.17*, a rapprocher, comme ailleurs, de Km (supra): viddhammi parohammi ratta-raso kharai to bhave (ed. bhanii!) rayana, aha khirato ruppam, piyammi puno bhave kanaga[m]. Et UK 865.17*-18*: viddhe tatra bhaved raktam yadi ratnani laksayet Page #26 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 40 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) 3.3.5. La profondeur a laquelle sera trouve le tresor (ou le gisement) est proportionnelle a la hauteur du surgeon. jettiya-metto uvarim javaio paroho tettiya-mettena hethao hoi uvarim uddhattanena tavaio hettho74 vi khaniya-mette hoi nihanam na sandeho (MK 114.18*; cf. UK 865.19*-20*) na yaniyai tam davvam paviyadi esa na va tti (Km 104.29) 75 'Plus le surgeon est haut, plus la richesse est profondement enfouie. On ne sait pas alors si on pourra l'atteindre ou non (Km) / Il suffit de creuser, et, aucun doute possible, le tresor est la (MK).' Ce point est egalement evoque dans le LS: yavan-matre pota urdhvam, tavan-matre rasatale alpo bahur va nidhih syad ... (LS 6.184abc). 3.3.6. Avant de commencer a exhumer la richesse dont l'existence est ainsi assuree, il convient encore de savoir si les conditions sont reunies. pour permettre d'y acceder. - jai uvarim so tanuo hetthe una hoi pihula-parivedho ta janasu tam pattam tanue una tam na hojja hi (Km 104.30*) - uvarim tanuo hettha pihulo jo payavo kaha vi hoi so nihi patto bhannai a-ppatto hoi vivario (MK 114.19*) uparistat tanus cet syad adhastat psthulo yadi praroho 'sau nidhim prapto viparitas tu so 'nyatha (UK 865.21*-22*) atha ksiram tato rupyam, pitam cet kanakam bhavet. 74 Pour hetha? Ni hettho ni herthe (Km 104.30*: $ 3.3.6) ne sont cites par PISCHEL, Grammatik, $ 107. 75 Il n'est pas certain que la seconde partie soit versifiee. 76 Ed. uvari (metriquement incorrect). - Ed. pihulo jo payavo havai | kaha vi ... est metriquement insatisfaisant. 71 L'ed. porte nihipatto, en un seul mot, tres probablement a tort. 1o Ed. a-ppatta est probablement une fausse lecture. Page #27 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 'Si [l'arbre/le surgeon) est mince au sommet, et de large circonference a la base, alors, sache-le, la richesse est disponible. En revanche, s'il est mince (a la base), c'est qu'elle ne le sera pas.' Selon le PC et le LS, c'est le surgeon qui doit avoir ces qualites: tres epais a la base, il garantit que le tresor est accessible.79 4. Vient maintenant la seconde etape: l'appropriation du bien convoite. Elle ne se fait pas sans mal, quand du moins elle se fait. C'est que l'acte de creuser tient du vol: les richesses souterraines sont la propriete de puissances divines ou surnaturelles qui acceptent mal de s'en defaire. Dans l'inconscient collectif indien, comme dans d'autres, les mines sont le fief d'etres malfaisants ou d'esprits divers.80 La pratique de la science de l'enfoui est donc dangereuse: 'Celui qui s'y livre, dit une strophe jaina, risque d'etre tue par les Vyantara ou autres dieux, ou encore d'etre pique par un scorpion, ou par un serpent.'1 Et de fait les naga passent traditionnellement pour etre preposes a la garde des tresors;82 a moins qu'elle ne soit devolue a quelque yaksa (KSS 6.8.67; MK 114.13sqq.; LS 6.191). Pour rendre la transgression plus admissible, il faut donc au moins un rituel, auquel, par exemple, le Nidhipradipa consacre une partie de son developpement (supra, $ 3.1). 79 Pattam, jao dharani-pavese thulo esa pao (PC 119.29) ou kincaisa poto 'ti-sthulo mule tat praptavan nidhim (LS 6.185ab). 80 W. CROOKE, op.cit. (n.54), vol.1, p.282sqq. (Mine and Cave Spirits'); p.286sqq. ('Bhuts Treasure Guardians'); Encyclopaedia of Religion and Ethics. Vol.8 (Edinburgh 1915), s.v. 'Metals and Minerals', p.588sqq.; M. ELIADE, Forgerons et alchimistes. Paris 1956, chap.5: 'Rites et mysteres metallurgiques'; ubi alia. 81 kattha vi a khanna-vayam karei jo Vantarai-devehim nihanijjai bhakkhijjai vinchia-sappaiehim pi Indahamsagani, Bhuvanabhanukevalicariya (XVe s.), ed. by Muni Shri RAMNIKVIJAYAJI. Ahmedabad 1976 (L.D. Series 54), v.466. Des dangers comparables guettent l'adepte de l'alchimie (v.465). 82 Cf. W. CROOKE, op.cit. (n.54), vol.2, p.134-136: 'Snake Treasure Guardians'; J.P. VOGEL, Indian Serpent-Lore or the Nagas in Hindu Legend and Art. London 1926, p.20sq., 44, 166, 205, 216 (donnees bouddhiques); M. ELIADE, Traite d'histoire des religions. Paris 1959, p.250sqq.; infra $ 5 (Hala, Sattasai v.577). 83 A.K. COOMARASWAMY, Yaksas. Part I. Washington 1928, p.4sqq. Page #28 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 42 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) Il conviendra de reciter des mantra et des prieres, et de proceder a des offrandes; et on comprend donc que le Rasendracudamani (XII's.: 3.29cd) invite, dans ce contexte, a avoir recours a des specialistes 'connaissant les formules capables de maitriser les esprits' (bhutavigraha-mantrajnas te yojya nidhi-sadhane). Il en va de meme dans les recits jaina. Les details sont plus ou moins abondants. Au minimum, il est indique que les chercheurs de tresor ont pris leur necessaire a puja (PC, MK) et ont procede au culte,84 non sans avoir examine les constellations ou scrute le ciel.8 La Kuvalayamala est plus precise: plein de sagesse, le jeune heros 'rend hommage au dieu' (devam namamo, Km 104.31). Ce singulier est collectif; la formule qu'il recite embrasse en fait quatre dieux: Indra, le maitre des dieux, puis les trois divinites plus specialement chargees du monde souterrain que sont Dharanendra, le roi des naga, Dhana(da), alias Kubera, premier des yaksa et dieu des tresors, et Dhanapala, sans doute un quelconque 'gardien du tresor'.86 De Kubera, il semble particulierement necessaire de se mefier: le Pancatantra le montre terrorisant les magiciens a l'aide d'une roue pour eviter qu'ils ne lui derobent ses tresors,87 le Harsacarita suggere qu'il repugne a en etre depossede.88 84 Puovayara-puvvam, PC 119.31; vyadhattam akhilam vidhim, LS 6.391d. 85 Niruviyam tehim rikkham, PC 119.26; disi joivi, AMKV 138.14*. Et encore Avasyaka-curni 551.2 (Av.IX,56,6): do mittani, tehim nidhanagam dittham. kalle sunakkhatte lahamo tti. So Namo indassa, namo dharan 'indassa, namo dhanayassa, namo dhanapalassa, Km 104.31; namo dharanendraya, namo dhanaya, namo dhanapalaya, Km en sk. *46.3-4. Et de meme: namo dharanendraya, namo dhanadaya, namo dhanapalayeti mantram pathata khatah pradeso maya, UK 866.5-6. 87 Dhanadena nidhana-harana-bhayat siddhanam etad bhayam darsitam (Pancatantra V.3). Cf. V.M. BEDEKER, 'Kubera in Sanskrit Literature, with special reference to the Mahabharata (from an earth-spirit to a god)': Journal of the Ganganath Jha Research Institute 25.1969, p.425-451 (et plus particulierement p.438). De fait, la statuaire la plus ancienne le montre souvent assis sous un arbre au pied duquel un tresor est suppose etre cache: cf. les catalogues d'exposition in the Image of Man. London 1982, ndeg 91 (epoque kouchane) et Palast der Gotter. Berlin 1991-1992, ndeg 134 (LX s.); U.P. SHAH, 'Some Minor Jaina Deities: Matrakas and Dikpalas': Journal of the M.S. University of Baroda 30.1981, p.96-98; Kubera est egalement assiste de deux ou plusieurs genies portants des tresors: M.-T. DE MALLMANN, Les enseignements iconographiques de l'AgniPurana. Paris 1963, p.134-135 et 229. Page #29 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 43 La Manoramakaha est la plus detaillee (114.22-23): la scene se passe a la premiere veille de la quatorzieme nuit de la quinzaine sombre. Hommage est d'abord rendu a l'arbre (un palasa). Des offrandes (bali) sont jetees tout autour. L'emplacement du tresor est egalement purifie et honore (puiyam), notamment a l'aide de fleurs. Un mandala est dessine, et des rites propitiatoires (rakkha-vihanam; non precises) sont accomplis. Le resultat n'est pas garanti pour autant. Les plus chanceux sont les chercheurs du PC, le prince de l'UK (866.6sqq.: supra $3.3.3) et le heros de la Km: tout en avertissant le jeune homme que la richesse decouverte est protegee par un cakravartin, une voix divine l'autorise a en prelever une poignee. Le tresor est ensuite soustrait a sa vue. Dans les autres cas, la joie est de courte duree, et la richesse a peine obtenue disparait sur-le-champ, ravie par des voleurs (AMKV 137.17* sqq.), ou par un yogin, complice peu scrupuleux (LS 6.392sqq.). Qu'esperer alors lorsque, loin d'etre accompagnee de precautions elementaires, l'exhumation est, le fait d'un obstine, sourd aux objurgations divines pourtant insistantes (LS 6.186sqq.), ou que les formules recitees ont ete amputees (MK 114. 28sqq.)? Dans les deux cas, la colere des etres surnaturels preposes a la garde dudit tresor se manifeste avec virulence et le coupable est transporte par la voie des airs a bonne distance du site de la decouverte. Etant donne les circonstances, l'occasion ne se presente guere d'envisager les eventuels problemes juridiques souleves par la decouverte d'un objet trouve, sur lesquels plusieurs recits du Pancatantra ou du Kathasaritsagara se revelent fort instructifs. Les sources jaina n'y font 88 Harsacarita, livre 2 (ed. KANE, p.35; notes, p.156): na dhanadasyeva nisphalah sannidhi-labhah. 89 Probable extension de la croyance traditionnelle et pan-indienne: les cakravartin possedent un certain nombre de nidhi, a la garde desquels sont preposes des naga (K.R. NORMAN, 'The nine treasures of a cakravartin': Indologica Taurinensia 11.1983, p.183193). - 90 Plusieurs temoignages rassembles par W. CROOKE vont dans le meme sens (op.cit. supra, n.54, vol.1, p.286); voir encore UK 957.15*. 91 Cf. L. STERNBACH, Juridical Studies in Ancient Indian Law. Part II. Delhi 1967, Chap.XIX: 'The Pancatantra and the Smstis, 1. The tale of Honest-Mind and Evil-Mind', p.3-10; KSS 7.1.37sqq.: le genereux Sattvasila trouve par hasard un tresor, puis un autre. Le roi vient a l'apprendre, convoque le jeune homme qui, immediatement, lui demande Page #30 -------------------------------------------------------------------------- ________________ Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) pas la moindre allusion. Pas d'allusion, non plus, au fait que toute activite ou toute profession impliquant de creuser est normalement interdite au jaina orthodoxe, moine ou laic, parce qu'elle met en danger les etres vivant dans la terre. L'insistance porte plutot sur l'aspect moral general: la recherche des tresors est une manifestation dangereuse de la convoitise (lobha) qui doit etre sanctionnee." Si elle figure parmi les moyens (plus ou moins recommandables) de s'enrichir, ell n'apporte pas que des satisfactions. Voici comment l'UK evoque la vie du kh.-vadin: abhyasyati khanya-vadam, niriksyate nidhana-laksanani, tusyati tad-darsanena, dadati ratrau tad-grahanartham bhuta-balim, duyate tad-angara-bhsta-bhajana-viksanena (60.10-12) 'Il etudie le savoir de l'enfoui, observe les signes caracteristiques indiquant la presence d'un tresor, est content s'il en voit un, dans l'espoir de s'en saisir, la nuit fait des offrandes aux esprits, se desolant s'il voit que le recipient ne contient que du charbon! Il n'empeche que les Indiens ne semblent jamais avoir doute de l'existence de tels tresors ou les avoir denigres, comme le fit, par exemple, au XIVe s. l'arabe Ibn Haldun.94 5. Enfin, il est instructif de retrouver dans la lyrique prakrite comme un lequel des deux il souhaite avoir. Satisfait de cette question, le roi laisse a Sattvasila la jouissance du premier tresor, et prend le second; et, par ailleurs, la litterature des dharmasastra, ainsi Manu 8.35sqq. 92 Voir, pour ce qui concerne les moines, L. SCHMITHAUSEN, The Problem of the Sentience of Plants in Earliest Buddhism. Tokyo 1991, $ 15.1. Les docteurs jaina auteurs de traites a l'usage des laics nomment cette activite sphota-karman. Son extension est variable selon les textes, comme l'indique R. WILLIAMS, op.cit. (n.55), p.118. Voir aussi DAS, p.66 (les pity habitent le sous-sol des arbres) et 516 (la terre vit; cf. SCHMITHAUSEN, Loc.cit.). 93 SK (citee supra, SS 1); Katharatnakara no 51 (supra, n.4). 94 Ibn Khaldun, The Muqaddimah. An Introduction to History. Translated from the Arabic by F. ROSENTHAL. New York 1958 (Bollingen Series XLIII), vol.2, chap. V [4], p.319-326: "Trying to make money from buried and other treasures is not a natural way of making a living'. Je remercie M. R.P. Das d'avoir attire mon attention sur ce point de vue. L'etude des biographies jaina de Kalkin montrerait egalement a quels extremes peut mener l'avidite effrenee pour la richesse; voir, par exemple, Vividhafirthakalpa de Jinaprabhasuri (ed Muni JINAVIJAYA, Bombay 1934), 40.1: savvao khanitta khanitta nihanani ginhissai. Page #31 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir. A la recherche des tresors souterrains 45 echo des points qui viennent d'etre evoques. Dans la Sattasai les termes nihi et nihana fournissent des comparaisons," transfigurees parce qu'elles suggerent un sentiment amoureux. Pour percevoir la justesse et le bien-fonde de la comparaison suivante, et l'intensite pathetique du desarroi de cette jeune femme, il faut se rappeler combien de peine requiert la determination de l'emplacement d'un tresor, et combien, une fois decouvert, il est fugace et fragile: 'La voici, ici, la, dans les touffes de roseaux, elle n'a pas trouve le lieu de rendez-vous et elle cherche partout a te voir. Ainsi fait-on d'un lieu a tresor qu'on a perdu." Inversement, dire que tel spectacle suscite autant de satisfaction que la vue de l'embouchure d'un vase a tresors' est une maniere d'indiquer le comble de cette satisfaction." On connait bien le cliche qui consiste a etablir une comparaison (dont le seme commun est la rondeur) entre les seins pleinement developpes de la jeune femme et des vases, fixee notamment dans le compose stana-kalasa." La Sattasai et sa tradition poussent plus loin ce que d'autres poetes effleurent: le vase est par excellence le recipient dans lequel on place le tresor que l'on veut enterrer;% de meme la gorge de la femme devient le tresor que seul est en droit de convoiter l'amant elu de son coeur. Dans deux strophes, que certaines recensions font se succeder (degnihana-kalasa-, 576 / degnihi-kalasa-, 577), ce qui est 95 Ed. A. WEBER. Leipzig 1881, Index, s.v. Je ne considere ici que les plus topiques. % aha sa tahim-tahim cia vanira-vanammi cukka-samkea tuha damsanam vimaggai pabbhatha-nihana-thanam va (318). De meme, l'insatisfaction ou une satisfaction momentanee sont volontiers comparees a 'un tresor acquis en reve': khana-bhangurena pemmena .. sivinaa-nihi-lambhena va | ditha-panathena loammi (Hala 423); suvinaya-laddho va nihi (Chappannayagahao 69, ed. A.N. UPADHYE, Kolhapur 1970.) 97 Tosijjai I nihana-kalasassa va muhena (508). 98 Aux references fournies par les dictionnaires, on ajoutera celles qu'a commodement rassemblees Th. OBERLIES, Prakrit thanavatta - A propos Skt. patta': Bulletin d'Etudes Indiennes 9.1991, p.108. Et encore An Anthology of Sanskrit Court Poetry. Translated by Daniel H.H. INGALLS. Cambridge 1965, p.164 (v.388, 392, 400, 407). 99 Supra, $ 1 et Km 105.1. Page #32 -------------------------------------------------------------------------- ________________ Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) appele a devenir une banale convention poetique garde encore toute sa fraicheur. 46 Le tresor est a la fois tentant et dangereux (supra, SS 4): cora sabhaa-satarham puno-puno pesaamti ditthio ahi-rakkhia-nihikalase vva podha-vaia-than'ucchange (577) 'Pleins de desir, pleins de crainte, les voleurs ne cessent de darder leurs regards sur la gorge opulente de la belle au redoutable epoux,100 comme sur une jarre a tresors gardee par un serpent.' La relation entre tresor et monde vegetal, egalement presente ca et la dans la poesie sanskrite,101 est incontestablement fondamentale dans cette epigramme tres travaillee a laquelle elle confere son originalite: kassa karo vahu-punna-pphal'-ekka-taruno tuham visammihai thana-parinahe mammaha-nihana-kalase vva paroho? (576) 'Ses fruits sont ses nombreux merites: qui est-il, cet arbre unique - dont la main s'attardera sur la courbe de tes seins, vases a tresor de Kama, comme [fait] la pousse [au-dessus du vase a tresors]?>102 100 Sk. praudha -Sura (commentaires); v.l. pikka/pakka = samartha (commentaires), sur quoi voir WEBER ad loc. 101 Ainsi, par exemple, dans le Subhasitaratnakosa reuni par Vidyakara (ed. D.D. KOSAMBI et V.V. GOKHALE. Cambridge 1957. Harvard Oriental Series 42), v.434: uttunga-sangata-payodhara-padma-yugmam nabher adhah kathayativa maha-nidhanam. ... These flowers tell of treasure hidden in my darling's belly' (trad. INGALLS, Anthology p.173, et note p.500). Cf. aussi R.P. DAS, "The romarajl- in Indian Kavya and Ayurvedic Literature': Medical Literature from India, Sri Lanka and Tibet. Ed. by G.J. MEULENBELD. Leiden 1991 (Panels of the VIITH World Sanskrit Conference Vol. VIII), p.21sq. 102 L'idee selon laquelle les seins constituent le tresor de Kama semble assez courante dans la lyrique prakrite: cf. Jayavallabha's Vajjalaggar. Ed. with the Sanskrit commentary of Ratnadeva and Introduction, English Translation, Notes and Glossary by Prof. M.V. PATWARDHAN. Ahmedabad 1969 (Prakrit Text Society Series), 312*3 et 312 4. Quant a la strophe 304, elle parait etre une refection insipide de l'epigramme de Hala ici examinee: sama-uttanga-visala ummanthiya-kanaya-kalasa-sankasa Kama-nihano va thana punna-vihunana du-ppeccha "Symetriques, fermes et genereux, pareils a des jarres d'or chauffe a blanc, les seins d'une femme sont comme les tresors de Kama: les hommes sans merite ne les verront pas.' Page #33 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 47 La comparaison envahit manifestement toute la strophe:103 il faut donc eviter de la rendre trop discretement comme le fait WEBER.104 Certains commentateurs ne s'y sont pas trompes et alleguent, a juste titre, la croyance etudiee au fil de ces pages: le surgeon grandit audessus du tresor, dont, en retour, il signale la presence: nidhana-kalasasyopari taroh praroho rohatiti loka-prasiddhih.105 D'autre part, on ne peut manquer de songer ici au motif connexe du purna-kalasa (@ghata) et a ses representations dans l'iconographie la plus ancienne: de ce vase d'abondance, symbole de fertilite associe a Laksmi, on voit surgir une vegetation luxuriante, le plus souvent des lotus. 106 La encore, richesse et monde vegetal se trouvent reunis. 6. Cette etude espere avoir montre le profit qu'on peut tirer des notations, a premiere vue anodines, glanees dans le kavya - poesie savante dont les auteurs sont rompus a tous les domaines du savoirou dans la fiction de toute nature (SS 1). On decouvre, au-dela, tout un pan de tradition conserve vaille que vaille dans des termes techniques (82), remontant ensuite aux traites heureusement disponibles ($ 3) qui lui donnent ses lettres de noblesse et l'erigent en un 'corps de doctrine' (FINOT). Appliquee ici aux disciplines de l'enfoui (khanya-vada et nidhivada), la demarche s'etait deja averee fructueuse pour l'examen des techniques de la gemmologie ou du vol: a propos de la premiere, on 103 Sur la place de wa (sk. iva) voir les discussions de Mathuranatha Sastri, commentateur moderne de la Sattasai, ad loc. (Bombay 1933, Kavyamala 21, p.291). 104 Wessen Hand wird wohl auf deinem vollen Busen, einem Schatzkelch des Liebesgottes ruhen? Gleichsam als Zweig eines Baumes, der blos die Fruchte fur viele gute Thaten tragt?' 105 Hala's Gahakosa ... with the Sanskrit Commentary of Bhuvanapala. Part I. Ed. by Prof. M.V. PATWARDHAN. Ahmedabad 1980 (Prakrit Text Society Series 21): v.201, p.92. Fondee sur ce commentaire, la traduction de PATWARDHAN (The Gahakosa of Hala. Part II. Delhi 1988) rend a peu pres l'idee generale, mais manque de legerete: Who will be that person, whose hand, a veritable unique tree bearing the fruits of many good deeds (done formerly), will be privileged to rest on your expansive breasts, treasure-jars of the God of love, resembling thereby a spray of tender leaves placed on a treasure-bowl (to identify the place where the treasure-bowl has been buried underground)?' 100 Cf., par exemple, A.K. COOMARASWAMY, Yaksas. Part II. Washington 1931, p.61-64 et pl. 31-33; M. ELIADE, Traite ... (supra, n.82), p.246sq.; supra $ 1(ii). Page #34 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 48 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) relira, toujours avec profit, l'introduction de L. FINOT aux Lapidaires indiens (cf. n.70); a propos de la seconde, les remarques de J.J. MEYER en introduction a sa traduction du Dasakumaracarita (1902), ou les pages de M. Bloomfield: un examen approfondi de la litterature narrative, dont il avait examine les multiples aspects, l'avait conduit a inferer l'existence d'un veritable savoir (steya-sastra).107 La supposition s'est revelee fondee: un manuel complet a ete decouvert, puis naguere edite et traduit. 108 Pour la connaissance de ces disciplines 'marginales', la litterature narrative jaina de langue prakrite a une place de choix, et l'on retrouve interesses par la detection des tresors souterrains les Maitres qu'on avait naguere vu preoccupes de metallurgie et d'alchimie. Le premier en date (VIII s.) et le plus eminent d'entre eux est incontestablement Uddyotanasuri, dont la Kuvalayamala fait figure de source d'inspiration et de modele litteraire. La quete des tresors souterrains est un domaine a la frontiere du reel et de l'imaginaire. Pris au sens large, le khanya-vada concerne aussi bien l'exploration des sources que la recherche des depots miniers ou des tresors enfouis par des individus desireux de les conserver en lieu sur, usage frequent de longue date en Inde. Le nidhi-vada est normalement relatif a ce dernier aspect. Khanya-vada et nidhi-vada exposent notamment les methodes destinees a permettre la localisation des richesses souterraines. L'observation des singularites ou des anomalies de certains arbres est l'une d'elles. Comme souvent, les details techniques paraissent a la fois elementaires et minutieux. Les precautions dont doit etre entouree l'appropriation du tresor, source de bouleversement pour le monde souterrain, sont egalement du ressort de ces disciplines (SS 4). 107 M. BLOOMFIELD, "The art of stealing in Hindu Fiction': American Journal of Philology 44.1923, p.97-133 et 193-229. Voir aussi A. HILLEBRANDT, 'Zur Charakteristik der Sarvilaka in der Mscchakatika. Spuren eines Steyasastra': Zeitschrift fur Indologie und Iranistik 1.1922, p.69-72 = Kleine Schriften, ed. R.P. DAS, Stuttgart 1987, p.461-464. 108 D. GEORGE, Sanmukhakalpa. Ein Lehrbuch der Zauberei und Diebeskunst aus dem indischen Mittelalter. Berlin 1991 (Monographien zur indischen Archaologie, Kunst und Philologie 7). Page #35 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains AiGr Abreviations 49 J. WACKERNAGEL, Altindische Grammatik. Band II,1. Einleitung zur Wortlehre. Nominalkomposition. Gottingen 21957. Band II,2. Die Nominalsuffixe von A. DEBRUNNER. Gottingen 1954. AMKV = Acarya Nemicandra's Akhyanakamanikosa with Acarya Amradeva's commentary. Edited by Muni Shri PUNYAVIJAYJI. Varanasi 1962 (Prakrit Text Society Series 5). BALBIR 1990 = _N. BALBIR. 'Scenes d'alchimie dans la litterature jaina': Journal of the European Ayurvedic Society 1.1990, p.149-164. BALBIR 1992 = N. BALBIR. 'La fascination jaina pour l'alchimie': Journal of the European Ayurvedic Society 2.1992, p.134-150. CDIAL R.L. TURNER, A Comparative Dictionary of Indo-Aryan Languages. London 1962-1969. DAS = Das Wissen von der Lebensspanne der Baume. Surapala's Vrksayurveda kritisch ediert, ubersetzt und kommentiert von R.P. DAS. Mit einem Nachtrag von G.J. MEULENBELD zu seinem Verzeichnis 'Sanskrit Names of Plants and their Botanical Equivalents'. Stuttgart 1988 (Alt- und Neu-Indische Studien 34). kh.-v. sk. khanya-vada, 'vadin ou pk. khanna-vaya, (degvai), voir SS 2. Km = Uddyotanasuri's Kuvalayamala (A Unique Campu in Prakrit) and Ratnaprabhasuri's Kuvalayamala (A Stylistic Digest of the Above in Sanskrit). Critically ed. with various readings by A.N. UPADHYE, Part I. Kuvalayamala. Bombay 1959 (Singhi Jain Series 45). Part II. Ratnaprabhasuri's Kuvalayamala. Bombay 1970 (Singhi Jain Series 46). KSS = Kathasaritsagara de Somadeva. Delhi 1970. LS = Jinaratna's Lilavati-sara. A Sanskrit Abridgement of Jinesvara-suri's Prakrit Lilavai kaha. Ed. by H.C. BHAYANI, Ahmedabad 1983 (L.D. Series 96). MEHLIG = Somadeva, Der Ozean der Erzahlungsstrome. Hrsg. von J. MEHLIG. Leipzig et Weimar 1991. MK = Vardhamanasuri's Manoramakaha. Ed. by R. PAGARIYA, Ahmedabad 1983 (L.D. Series 93). MW Le dictionnaire de MONIER-WILLIAMS. NP The Nidhipradipa of Sri Siddha Srikanthasambhu. Ed. by K. SAMBASIVA SASTRI. Trivandrum 1930 (Trivandrum Sanskrit Series No. CV; Sri Setu Laksmi Prasadamala No. XVII). n.-v. nidhi-vada, nidhana-vada, ou vadin, voir SS 2. Ocean The Ocean of Story, being C.H. Tawney's Translation of Somadeva's Katha *Sarit Sagara ed. with Introduction, fresh explanatory Notes and terminal essay by N.M. PENZER in 10 volumes. London 1924-1928. Puhaicamdacariya by Acarya Santisuri. Text ed. by Pamnyasa Muni Shri RAMNIKVIJAYJI. Introduction etc. by Pandit A.M. BHOJAK. Ahmedabad et Varanasi 1972 (Prakrit Text Society Series 16). H.T. SHETH, Paia-Sadda-Mahannavo. Banaras 21963 (Prakrit Text Society Series 7). SK = Samaraiccakaha: voir n.9. Page #36 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 50 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) UK = The Upamitibhavapranca Katha of Siddharsi. Originally edited by the late P. PETERSON ... and continued by Prof.Dr.H. JACOBI. Calcutta 1909 (Bibliotheca Indica, New Series 1205sqq.). Summary: In India, the knowledge of plants is primarily meant to serve practical purposes. As is well-known, botany is closely connected with ayurveda. This paper aims to study how it can also help the fulfilment of artha by providing a means to explore underground wealth. Apart from using magical means, treasure-hunters can be successful if they know how to carefully observe and interpret the indications given by the nature surrounding them. Various hints found in Indian narrative literature from about the 7th century onwards serve as evidence for a strong belief in a regular connection between the appearance of trees and the presence of treasures in the ground below ($ 1). In this paper it is shown how in ancient India there existed a lore concerned with all that is found underground, and how traces have been preserved in Sanskrit and Prakrit literature. This lore is referred to by the terms khanya-vada and nidhi-vada. The former is a more general term; according to the context, it may refer to mineralogy, water-divination, or the search for treasures. This latter activity is normally designated by the second term ($ 2.1). The texts refer to specialists of this lore (vadin), who appear to be Saiva (especially) Pasupata ascetics ($ 2.2.1), but also kings or young men of the merchant class who have learnt this lore along with other kalas ($ 2.2.2). An interesting anecdote from the Kathasaritsagara shows that the treasure-hunter might even be an employee of the king, being, if good, considered a very precious asset ($ 2.2.3). These specialists draw their knowledge from specific sastras ($ 3). One of these is the Nidhipradipa, whose date unfortunately is not known. It may have been composed and used in South India. Since the NP is the only edited book of this kind dealing rather systematically with various aspects of treasure-hunting, an analysis of its contents is given here ($ 3.1). Apart from such systematic and comprehensive works, there are also similar teachings scattered here and there, thus in the Behatsamhita ($ 3.2.1) and in Jaina literature. For instance, at a comparatively early date (6th century?), one stanza indicating how to locate a treasure from the observation of thorny and thorn-less trees is quoted in Simhasuri's commentary on Mallavadin's Dvadasara-nayacakra ($ 3.2.2). Some clear remnants of khanya-vada have also come down to us in Prakrit (or Jaina Sanskrit). The relevant passages (mostly didactic stanzas) are incorporated ($ 3.1). aspects of treasurer of this kind a Page #37 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 51 in six novels composed between the 8th and the 13th centuries (SS 3.3.). The following points are stressed and tackled in turn: - More important than the tree itself seems to be the existence of an offshoot (pk. paroha = sk. praroha; pk. paya(a)) deeply penetrating into the ground (SS 3.3.1). - Not all species of trees appear to signal the presence of a treasure ($ 3.3.2). Milky trees seem to exclude it (SS 3.3.2.A), whereas the bilva and the palasa unmistakably appear to indicate something good ($ 3.3.2.B). -The size of the tree(/offshoot) is important, and the quantity of the wealth beneath depends upon this (SS 3.3.3). - What this wealth will be is to be known from the colour of the sap of the tree. Here it appears that the wealth to be discovered is not necessarily a treasure deposited by some human being, but rather an ore (silver, gold or ruby). As a matter of fact, connections between plants and ores are known to exist and have been noticed a long time ago especially in China. This is known as 'geobotanical prospection' ($ 3.3.4). - From the height of the offshoot one may also be able to know at what depth the ore or the treasure will be found (SS 3.3.5), and whether it can be reached at all (SS 3.3.6). The ritual and moral aspects of treasure-hunting and geological prospecting are then examined ($ 4). In the Indian tradition, underground riches are the possession of various gods (e.g. Kubera) or supernatural beings (yaksas and nagas). A human attempt to take possession of them is therefore a kind of theft which as such requires various precautions (recitation of prayers, offerings, etc.). In many cases these appear to be insufficient and the contact between human beings and underground powers may end in failure. Finally it is shown how the stock of beliefs reviewed in the present paper also finds its way into Prakrit love poetry (SS 5). Special attention is drawn to Hala's Sattasai v.576 and 577 (in WEBER's edition), where the common comparison of a woman's breast with a (treasure) jar is skilfully expanded. A full English translation of the earliest and most comprehensive Jaina account found in the Kuvalayamala of Uddyotanasuri (dated 779) is given here exempli gratia (Km 104.21-105.3): 'Then, as he was immersed in his thoughts, [the merchant Sagaradatta] noticed the extended offshoot of a malura-tree. This Page #38 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 52 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) sight reminded him of the Teaching of Excavation (khanna-vao), which he had recently learnt: "Yes! It is said in the Teaching of Excavation: "Leaving aside the milky trees, if there is an offshoot of any other tree, know it: there is at this place some wealth, be it limited or unlimited." ($ 3.3.1A) So, there is certainly some wealth here. There must be a reason behind this fact. Because it is said: "[It is) sure in the case of bilva or palasa-trees." ($ 3.3.1B) And how much wealth will there be? "In case of a thin tree(/offshoot), the wealth will be small, and abundant if the tree(/offshoot) is thick. If the tree (/offshoot) shines at night, it will be abundant, and small if it is warm (/dry)." ($ 3.3.2) This tree is thick, so the wealth will be abundant. Will it be gold, or silver, or jewels? Well, "When the offshoot is pierced, if red comes out, it will be rubies. If white comes out, then silver. And if yellow comes out, it will be gold." ($ 3.3.4) And how far (below) will this wealth be found? "The higher (the offshoot], the lower it will be." It is not known whether this wealth can at all be reached or not. [$ 3.3.5) "If the offshoot(/tree) is thin at the top but has a large circumference at its base, then, know it: you will get the wealth; but if it is thin (at its base), you will not get it." ($ 3.3.6) In this case, it is not far below. Then let me dig. I shall worship the god: "Homage to Indra, homage to Dharanendra, homage to Dhanada (= Kubera), homage to the Protector of Wealth?" Sagaradatta] dug out the place while reciting and saw the treasure: "Let me take it" she thought). But, suddenly, a voice: Page #39 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 53 "Even if it has become accessible to you, this treasure is being protected by a cakravartin. So just take a little quantity, not more than the value of the pot, only one handful." Having heard this, he took one handful of coins. And the treasure immediately vanished out of his sight in the lower world. He tied this valuable parcel in a cloth [attached) at his neck.' Page #40 -------------------------------------------------------------------------- ________________ 54 Journal of the European Ayurvedic Society 3 (1993) APPENDICE Notes d'alchimie jaina (Complements a JEAS 1.1990, p.149-164 et 2.1992, p.134-150) 1. LE PRATICIEN DU DHATUVADA Voici comment l'Upamitibhavaprapanca Katha de Siddharsi (debut du IXe s.) evoque sa vie, une vie haletante faite d'espoirs et de deceptions (cf. JEAS 1, p.161): 'Il s'adonne a la metallurgie(/l'alchimie), frequente les Maitres alchimistes (narendra), recoit leur enseignement, rassemble des racines (mula-jalani), collecte mineraux et terres (dhatu-mrttikan), incorpore le mercure (samupadhaukayati paradam); les processus d'assimilation, de solidification et de mort du mercure (jarana-caranamarana-karana) le mettent dans les tourments. Jour et nuit, il fait chauffer le minerai (dhamate), n'arretant pas de souffler bruyamment (put-karoti). S'il reussit a obtenir une particule d'or ou d'argent, la joie l'envahit (pita-sveta-kriyayor lesa-siddhau hrsyati). Son seul regal, jour et nuit, c'est l'espoir (khadati ... asa-modakan); et pour cela, il est pret a depenser le peu d'argent qui lui reste. L'agitation que provoquent des rites mal reussis le tue' (UK 60.12-18). 2. VOCABULAIRE TECHNIQUE DE LA METALLURGIE ET DE L'ALCHIMIE Pk. akkhara, sk. aksara (JEAS 1, p.156-157), l'Imperissable', pourrait bien designer le mercure plutot que l'or, comme amsta, revetu de connotations comparables (Rajanighantu v.108: R. GARBE, Die indi schen Mineralien, p.15). Pk. kallana, sk. kalyana (JEAS 2, p.138 et n.23), 'or': le terme est bien atteste dans la litterature jaina en sanskrit, par ex.: Pradyumnasuri, Samaradityasamksepa 8.249; Bhavadevasuri, Parsvanathacarita 1.48 et 1.782 (M. BLOOMFIELD, The Life and Stories of the Jaina Savior Parcvanatha. Baltimore 1919, p.212 et 224). Gandha (JEAS 1, p.157) etait ici a comprendre comme une abreviation de putigandha que les lexiques specialises enregistrent au nombre des synonymes de trapu et vanga 'etain' (ex. GARBE, op. cit. v.21, p.6), et non comme designant le 'soufre'. Recourir a la variante etait par consequent superflu. Pk. dhaum dhamai, sk. dhatum dhamati (JEAS 1, p.155; 2, p.136), 'faire chauffer le metal': l'expression est bien attestee dans la litterature Page #41 -------------------------------------------------------------------------- ________________ N. Balbir, A la recherche des tresors souterrains 55 jaina, ainsi Km 104.19* (dhauvvayam ca ta dhamimo); Bhavadeva suri, Parsvanathacarita 3.429 (BLOOMFIELD, op. cit., p.87, n.24). Narendra (JEAS 1, p.155) est, en fait, atteste dans le rasasastra: ex. Rasarnavakalpa (ed. ROY) v.394 (p.34 et 89). Bhuri (JEAS 1, p.161 et n.43), "or', terme donne par les lexiques, est egalement atteste chez les auteurs jaina ecrivant en sanskrit, dont on connait le gout pour le vocabulaire 'rare' ou recherche: ex. Pra dyumnasuri, Samaradityasamksepa 8.286. Rasam bandhai (JEAS 1, p.155), 'fixer le mercure'. Noter, en outre, Km (151.7*) ... dhauvvayam ...(151.8*) ..sasa-bandha-rasayanam ceya. La encore, la distinction entre operations metallurgiques proprement dites et operations magico-alchimiques semble claire. L'adjonction du rasayana est remarquable (cf. dhanasa dhatu-vadena, jivitasa rasayanaih: Bhavadevasuri, Parsvanathacarita 3.433). vedhin (JEAS 1, n.31, p.159): siharammi kuviyae sahassa-veho raso ..atthi | girim aruhium tam do vi giahimo, tena sahimo kanayam (Kumarapalapratibodha 354.25*-26*); voir, sur ces composes, J. JOLLY, 'Der Stein der Weisen', Festschrift E. Windisch, Leipzig 1914, p.98sqq. 3. MOTIFS ALCHIMIQUES; STATUT DU SAVOIR ALCHIMIQUE Le naif et l'alchimiste charlatan (JEAS 1, p.158sq.): une autre version de la mesaventure de Carudatta figure dans le Brhatkathakosa (ed. .: A.N. UPADHYE. Bombay 1943), ndeg 93, v.79sqq.; et on peut lire d'autres variantes du recit-type dans le Kumarapalapratibodha, p.354 et 416. But et statut de l'alchimie (JEAS 1, p.162-163 et 2, p.140-141): dans la Samaraiccakaha (2.18), l'Upamitibhavaprapanca Katha (p.3 v.26; 60.12sqq.: supra SS 1) et l'Akhyanakamanikosavrtti (223.10*sqq.), le dhatuvada figure aux cotes d'autres moyens legitimes d'enrichissement comme l'elevage, le commerce et l'agriculture. C'est egale.ment une discipline maitrisee par des ascetes non jaina (Km 291.17*). Elle a donc sa place dans les listes enumerant des techniques occultes (Km 151.7*).