Book Title: Rencontres Indo Britanniques Au Gujerat A Propos Dune Nouvelle De Dhumketu
Author(s): Nalini Balbir
Publisher: Nalini Balbir

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Page 15
________________ Rencontres indo-britanniques au Gujerat 45 - "Les monts Sahyādri m'appellent. S'il se trouve un sculpteur qui soit aussi un artiste, il faut lui dire de conserver vivant le message transmis par Hīrādhar. Le peuple a succombé. Cependant sa sujétion n'est plus une question d'années, seulement de jours. Mais pour l'heure, je tiens à me rendre une fois dans le pays béni où se trouvent Haripant Phadke, Parashurām Bhāū et Son Excellence Nānā Farnavis, là où brillent les monts Sahyādri. Je possède la plus belle cevre de Maître Hīrādhar. Je veux l'emporter là où règne l'indépendance et, si possible, la montrer à quelqu'un. Celui que ne saisit pas le désir violent de sacrifier sa vie pour l'indépendance est totalement incapable de comprendre le message transmis par Hīrādhar. C'est pourquoi, avant de mourir, je veux remettre entre les mains d'un peuple qui se dit libre une ou deux oeuvres de Hirādhar – il n'est pas en mon pouvoir d'en sauver plus. Ce sera peut-être l'occasion de trouver un connaisseur..." Someshvar s'éloigna tout doucement. Forbes regarda cet homme: simple, vieux, rayonnant, puis regarda les notables. L'Anglais, perspicace, perçut toute la différence qu'il y avait entre les deux. “Peut-être va-t-il partir aujourd'hui même pour Poona”, dit Forbes aux notables. - "C'est un original, Sahib, un savant, mais un original!", répondirent-ils. Forbes ne cessait de contempler les incomparables ceuvres de Hirädhar. Tombant sur le dos du rayonnant brahmane qui s'éloignait doucement, la lumière du soleil semblait répéter une vérité qui était comme l'expression de plusieurs expressions: "Qu'une chose s'écroule, et tout s'écroule.” Interprétation Les concordances événementielles entre l'ouvre littéraire et la relation autobiographique de J. Forbes sont évidemment frappantes: le contexte historique de 1783 et la reddition aux Marathes de Broach, puis de Dabhoi; la visite au fonctionnaire britannique des notables locaux et les négociations qui entourent l'octroi du cadeau d'adieu désiré. Il est également facile de relever entre les deux textes des concordances littérales: quelques phrases de Dhūmketu ne semblent-elles pas traduites de l'anglais? Et pourtant, la nouvelle gujeratie est bien autre chose qu'une pâle copie. Le souci d'exactitude manifesté par Dhūmketu encourage à une lecture vigilante jusque dans les détails. Ainsi, ce n'est ni le hasard ni l'imagination personnelle de l'auteur qui le conduisent à nommer Hirādhar le Maître sculpteur de la Porte Hīrā, mais la référence à une tradition étiologique rapportée par certains historiens du Gujerat. D'une manière générale, en effet, Dhümketu est un écrivain savant. Ce qualificatif, interprété dans la tradition indienne, n'a, comme on sait, aucune valeur péjorative, bien au contraire: l'un des plaisirs de la lecture consiste précisément à décrypter les allusions ou à savourer les références directes, ce que seul peut faire le lecteur également savant ou pétri de la même culture. En l'occurrence, les références littéraires aux poètes

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