Book Title: Rencontres Indo Britanniques Au Gujerat A Propos Dune Nouvelle De Dhumketu
Author(s): Nalini Balbir
Publisher: Nalini Balbir

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Page 19
________________ Rencontres indo-britanniques au Gujerat 49 donner raison au brahmane qui, considérant les circonstances peu propices à la protection des ceuvres d'art, préféra, bien qu'à contrecoeur, en laisser quelques-unes quitter le territoire national$3... Cependant, l'existence de terrains d'entente entre Britanniques et Indiens est limitée, et ne doit pas masquer la complexité de relations dont la fragilité est bien perceptible dans le récit de Dhūmketu. En premier lieu, ces affinités ne dépassent pas le cercle des intellectuels. Insensible à la beauté, le groupe indifférencié des notables locaux est réduit à jouer le rôle d'intermédiaires entre deux représentants de l'intelligentsia qu'ils comprennent aussi peu l'un que l'autre: les conceptions du brahmane indien leur sont aussi étrangères que celles de l'étranger. Ils se bornent à remplir la fonction que leur assigne la tradition, manifestant vis-à-vis de l'Occidental (désigné, tout à fait normalement, comme le Blanc, le Sahib, l'homme au chapeau) le respect qu'ils lui doivent et, de surcroît, un attachement sincère. Mais, incarnant la masse amorphe d'une population qui n'a pas les moyens d'agir sur l'histoire, ils ne peuvent qu'exprimer des réactions ou des sentiments sans conséquence. La partie se joue donc finalement entre l'Anglais et le brahmane, que leur attitude à l'égard des Marathes paraît opposer irrémédiablement. Présents d'un bout à l'autre de la nouvelle, ces derniers offrent en effet une image double et ambiguë. La première est celle de guerriers expansionnistes, despotes et destructeurs redoutés des populations qu'ils soumettent. Elle reflète la perception occidentale de l'époque, qui, influencée par les philosophes des Lumières, ne voit les gouvernants indiens que comme des oppresseurs54, et considère la conversion au christianisme comme la seule manière de délivrer les populations des superstitions et de la servitudess. Pour J. Forbes, la tristesse de la population du Gujerat devant les envahisseurs marathes et le départ des Anglais "was a public testimony that the natives preferred the British to an asiatic government569 et "affords an additional evidence of honourable feeling and attachment, opposed to many instances of ingratitude, oppression and cruelty, Cultural Life as Depicted on Dabhoi Gates, Gujarāt", Joumal of the Oriental Institute Baroda 34, 3-4, MarchJune 1985, p. 181-191. 53. La réglementation sur le contrôle des fouilles et l'appropriation des objets d'art est évidemment bien postérieure à l'épisode relaté par James Forbes. 54. Cf. S.N. MUKHERJEE, Sir William Jones. A Study in Eighteenth-century British Attitudes to India. Hyderabad: Orient Longman, 1987, p. 12 (1968'). 55. J. FORBES, Oriental Memoirs, vol. 2, p. 500sqq. Il est également l'auteur d'un texte indépendant intitulé Reflections on the Character of the Hindoos, and on the Importance of Converting them to Christianity (1810). 56. J. FORBES, Oriental Memoirs, vol. 2, p. 340.

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