Book Title: Linde Classique Et Le Dialogue Des Religions Author(s): Johannes Bronkhorst Publisher: Johannes Bronkhorst View full book textPage 6
________________ 788 JOHANNES BRONKHORST L'INDE ET LE DIALOGUE DES RELIGIONS 789 l'existence de la personne.29 Le sens original de l'expression "êtres appa pas applicables pour quelqu'un qui n'accepte pas l'existence de la cruche. De ritionnels" (sattva upapăduka) est quelque peu obscur.30 Il semble pro même, (dans la phrase) "l'âme n'existe pas", l'âme est-elle niée dans un certain bable que Uddyotakara l'ait reprise dans le sens qu'y attribuaient les endroit ou à un certain moment? um, le terme "etre" (sattva) étant parfois synonyme de "åme" Uddvotakara enchaîne pour montrer que, bien au contraire, la phrase (atman). Quoi qu'il en soit, dans ce dernier cas Uddyotakara quli en soit, dans ce dernier cas Uddyotakara semble avoir "l'âme n'existe pas" ne vise pas la négation de l'âme dans un certain pris la muerte de presenter comme citation une phrase qui ne se trouvait endroit ou à un certain moment, mais plutôt sa negation tout court, ce qui probablement pas, sous cette forme exacte, dans les textes des bouddhistes. est impossible. Car, Le passage d'Uddyotakara que nous avons étudié au début s'occupe également de la question de savoir quel est l'objet dénoté par le mot «je». celui qui nie l'âme (tout court) doit dire quel est l'objet du mot «ame. Nous ne Une semblable question apparait dans un autre passage, que nous allons voyons effectivement pas de mot qui n'ait pas d'objet. maintenant regarder de plus près. Dans ce passage Uddyotakara nie car- Il s'attaque ensuite à la solution la plus evidente ou porno rement qu'on puisse dire "l'âme n'existe pas". D'après lui les mots qui ne correspondrait-il pas à une fiction de l'esprit, com m constituent cette phrase se contredisent. Voici quelques extraits du passage objective? Non, répond Uddyotakata, concerné:31 l'imagination qu'une telle solution n'est pas possible,33 Ou peut-on croire Ici (il faut dire) pour commencer que les deux (!) mots (pada) "l'âme n'existe qu'il existe des mots - comme par exemple «vide- ($ünya) ou obscurité pas" (na asti ammd) se contredisent: ce mot same (atm) (même) en accord (tamas) - qui ne désignent pas forcément un objet? De nouveau la réponse syntaxique avec les (ou le?) mot(s) n'existe pas (na asti) ne communique pas est négative.34 Des exemples du type «corne d'un lièvre (sašavişāna), est l'inexistence de l'âme. Car par le mot wames Isonl existence est exp ame. Car par le mot same (son) existence est exprimée, et «fleur dans le ciel (khapuspa), etc. ne prouvent pas le contraire, parce que par n'existe pas sa négation; mais ce qui est nié quelque part. se trouve ail- dane nae car c'est le lien entre les composantes du compos e leurs. Par exemple, le mot cruche en accord syntaxique avec un'est pas [la] (na asil) ne peut communiquer l'inexistence de la cruche, mais il nie (sa pré Quels que soient les arguments exacts qu'utilise Uddyotakara pour sence) dans un certain endroit ou à un certain moment. [La phrase] "la cruche défendre sa position, l'essentiel est son insistance sur le fait que les mots, y n'est pas [là)" (nasti ghatah) nie (sa présence] dans un certain endroit, (comme compris le mot «me» dans la phrase "l'âme n'existe pas", doivent référer prejele nest pas dans la maison"; ou elle la nie à un certain mo à des obiets y correspondant. Voilà un exemple de ce que j'appelle le ment, [comme dans les exemples] "elle n'est pas [là] maintenant", "elle n'est pas (là) auparavant", "elle n'est pas [la] après". Toutes ces négations ne sont «principe de correspondance, et que l'on pourrait formuler approximativement de la manière suivante: "les éléments constituant la situation décrite par une phrase correspondent aux mots de cette phrase". 29 TI 1649, tome 32, p. 464c 1. 20. Jugé à la lumière de l'exemple de "l'âme n'existe pas", le principe de 30 Voir Abhidh-k-bh(P) p. 118 1. 26 - p. 119 1. 2; Abhidh-k(VP) tome VI p. 258 n. correspondance a certainement l'air peu convaincant pour ceux qui ne 2: BHSD p. 162 s.v. qupupăduka. L'expression surtvam upapridukam (ou aupupi croient pas que le sanscrit soit la langue éternelle, ou au moins la langue dukam) se trouve également, mais dans un autre sens, dans la Carakasamhita créée par des sages avec des connaissances de la réalité bien supérieures (Särirasthana 3.3); pour une discussion, voir Roşu, 1978:180 sq. 31 NV p. 699 1. 1 sq.: tatra nasty ameti pade tavad vähanyete, nástisabdasa månadhikarano 'yam almasabdo nārmano 'sattvam pruripadayatil kim karunam? ameri sallvam abhidhiyate, năstiti tasya prarişedhah, yac ca yatra prarişidhyare tar 32 Ibid. p. 701 1. 5-6: atmaprarişedham ca kurvanendimasabdasya visayo vaktavyah/ tasmad anyarrasti, yarha nástina samanadhikarano ghatasabdo na ghatábhavam na hy ekam padam nirarthakam pasyamah praripadayirum saknori, api tu deśakālavisese prarisedhatil násti ghata iti desavise 33 Ibid. p. 701 1. 9 sq. $e vi prurişedho gehe nästini, kõlaviseşe ve pratişedha idānim nastiri prant nisti ürdhvam năstiri/ sarvas criyam prarişedho nánabhyupagataghatasarrvasya yuklah/ 34 Ibid. p. 702 1. 3 sq. tarhá násty armeri kim ayam desavisese pratişidhyate atha klavišese iril 35 Ibid. p. 703 1. 19 sq.Page Navigation
1 ... 4 5 6 7 8 9 10