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________________ 138 REVIEWS l'usage et la lettre de la regle. Y a-t-il divergence, ils s'empressent en reinterpretant l'enonce de la regle de montrer que ce n'est qu'apparence. La Durghatavrtti se signale par son effort en ce sens. Elle resout un desaccord en reinterpretant un enonce de la regle, un ca par exemple. Ou bien elle reconnait a certains textes (purana, epopee, etc.) une independance legitime par rapport a Panini. Parfois elle rend un verdict d'incorrection. Ou, souvent, au lieu de reinterpreter la regle, elle reinterprete le vers cite, tel ce vers du Kiratarjuniya (17.63) ou pour justifier un ajaghne on propose quatre constructions differentes et fort inattendues (8 505). On voit dans ces debats comment la grammaire est un instrument d'explication pour le commentateur de kavya. Dans le vers 2.35 du Kiratarjuniya, cite $754, on trouve une forme nayanti qui est mise en question, parce qu'une desinence atmanepada est requise en vertu du sutra 1.3.37 qui la prescrit quand l'objet se situe dans l'agent, sans pour autant etre partie de son corps. Or, ici, l'objet est la force qui appartient aux ambitieux, agents de l'action signifiee par nayanti, verbe que Mme Rocher traduit par "deploient" et traite comme ayant un seul objet. Mallinatha entend la phrase autrement et propose une solution grammaticale originale. Le verbe nayanti a le sens de prapanam "faire atteindre" et se construit avec un double objet. Mallinatha construit nayanti avec paurusam "le courage" et sivam aupayikam"un moyen favorable", au lieu de faire de ce second terme un objet de viganayya. Or le moyen favorable est un objet qui n'appartient pas a l'agent et Mallinatha peut dire que c'est en raison de la presence de cet objet que la desinence atmanepada n'a pas ete employee. Ce faisant, il donne a la stance le sens: "apres s'etre assure de l'heureuse obtention d'un fruit considerable, ils joignent leur courage au moyen favorable, maitres de la precipitation de la colere, ceux qui desirent vaincre". Au $817, dans sa traduction obscure de sens, Mme Rocher ne rend pas justice a la stance etanmanda ... attribuee a Vallana par le Saduktikarnamsta (donnee aussi dans le subhasitaratnakosa, no. 1664, ed. Kosambi-Gokhale, citee Vakroktijivita, Kavyaprakasa, etc.). Une traduction litterale nous semble pouvoir etre (voir aussi la traduction de M. Ingalls dans An anthology of sanskrit court poetry, HOS, 44, Harvard, 1965): "ce couple de tes seins au teint legerement clair, au centre sombre, comme le fruit tinduka lent a murir, apparait bon pour la caresse de la main des beaux jeunes chasseurs; ainsi, o fille du chef du hameau, le troupeau d'elephants priant desesperement pour la protection de sa vie, te demande-t-il: ne couvre pas ta poitrine d'un vetement de feuilles (de plumes de paon, selon Sridhara)". Jhalakikar place cette stance dans la bouche d'un amoureux (voir son commentaire sur Kavyaprakasa, Poona, BORI, 1950). La scene se passe dans une tribu de chasseurs ou habitants de la foret, d'ou un effet de couleur locale particulier. L'amoureux prend comme pretexte un troupeau d'elephants qui s'enfuit devant les chasseurs. Il figure cette fuite comme signifiant une priere des elephants adressee a la jeune fille: si la beaute de tes seins attire et retient les jeunes chasseurs, ils nous oublieront et nous laisseront vivre tranquillement; devoile-donc ta poitrine. Et ainsi l'amoureux a indirectement manifeste son desir. Le Kavyaprakasa donne ce vers comme exemple du defaut cyutasamskyti, faute de grammaire. Anunathate selon la regle recoit la desinence atmanepada, quand le sens est celui de souhait, asih. Or ici le sens est yacanam "demande". Nagesa precise quelle peut etre la difference entre ces deux sens. Il y a asih, "souhait", quand il y a simple desir; il y a yacanam, "demande", quand il y a une demarche provoquee par un desir, mais qui vise a produire chez quelqu'un d'autre un desir de donner l'objet desire. Jhalakikar marque la distinction plus simplement: il y a asih quand l'objet du verbe anunathest seulement la chose desiree, le sens de souhait n'etant pas possible si la personne a qui le desir s'adresse est donnee comme objet. Dans le cas present, l'accusatif tvam interdit le sens de souhait. Le commentaire de Sridhara (ed. Sivaprasad Bhattacharyya, Calcutta, Sanskrit College, 1961, p. 188) rejette qu'il y ait incorrection et invoque la these du caractere facultatif de l'emploi dans les sens autres que celui de souhait, these qu'il attribue a Maitreya et au Jnapakasamuccaya de Purusottamadeva.Page Navigation
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