________________ 109 2. Cette tradition est-elle correcte ? Des doutes ont ete souleves, notamment par Madeleine Biardeau ( 1964 : introduction), et il s'avere necessaire de reconsiderer les arguments principaux. Nous examinerons d'abord quelques arguments qui s'opposent directement au point de vue traditionnel. L'argument le plus important est le suivant: la Vrtti elle-meme attribue les strophes a quelqu'un d'autre, qu'elle appelle tatrabhavat 'maitre honorable'. Le cas le plus clair se trouve dans la Vitti sous VP 2.447 (2.242 ed. Iyer). On y trouve le passage suivant (p. 315 1. 9-11, ed. Iyer) : tatrabhavanto manyante : bahusv api tinantesu yesv arthalaksana kacid akanksa vidyate tesam ekavakyatvam na vyavartyatel tatha ca sutre'rthayan tinparyudaso bhavati/ Le maitre honorable pense : le fait d'appartenir a une seule et meme phrase n'est pas nie dans le cas de formes verbales personnelles dont les sens ont besoin l'un de l'autre, meme si elles sont nombreuses. C'est ainsi que la negation de tin 'forme verbale personnelle' dans le sutra est fonctionnelle. Ce passage demande une explication. Le sutra qu'il envisage est P. 8.1.28 tin atinah "Une forme verbale personnelle [a le ton grave, venant] apres un mot qui n'est pas une forme verbale personnelle" (tr. RENOU 1966 : II: 358). Le Mahabhasya discute d'une objection selon laquelle le mot atin est superflu, puisqu'une seule phrase ne contient qu'une seule forme verbale personnelle (tin). Il est donc inutile d'exclure l'une des formes verbales personnelles apres une autre, comme le fait l'expression atinah. Le 'maitre honorable' differe sur ce point. Selon lui, une seule phrase peut contenir plusieurs formes verbales personnelles, a condition que les sens, de ces formes aient besoin l'un de l'autre. Par consequent, l'expression atinah, c'est-a-dire la negation de tin, est fonctionnelle dans le sutra.