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INTRODUCTION
cette galerie, enterrée depuis des siècles, depuis la fondation sans doute, pour parer à la poussée des matériaux trop lourds, j'avais pu, au premier examen des photographies prises pendant une exhumation de courte durée, reconnaître dans les sujets traités et jusque dans le libellé des inscriptions l'inspiration de ce Karmavibhanga que j'avais découvert sept ans auparavant, au Népal ; minute incomparable où j'ai compris et senti toute la grandeur de l'euvre accomplie par la civilisation indienne. La menace d'un écroulement précipité avait arrêté par bonheur les imagiers en plein travail ; s'il restait quelques morceaux à dégrossir ou à parachever, on n'avait pas eu le temps aussi d'effacer sur chacun des panneaux les inscriptions grossièrement entaillées comme de vulgaires graffiti pour indiquer aux sculpteurs le sujet proposé En face de données qui semblaient défier, à force d'aridité ou de monotonio, l'imagination et le ciseau, les artistes Javanais se sont rabattus sur les à côté du texte ; ils se sont amusés à des compositions de fantaisie, assurés que les moines sauraient donner aux pèlerins les explications nécessaires Les moines se sont tus depuis des siècles, mais le texte qu'ils récitaient, disparu lui aussi, a ressuscité. Je me suis toutefois contenté prudemment de limiter mes références aux panneaux inscrits : je laisse à d'autres, plus compétents que moi et mieux doués pour la lecture des images, le soin d'établir une relation continue entre les 160 panneaux de Boro-Budur et les rubriques du Karmavibhanga. M. Krom, qui a prouvé sa maitrise par les descriptions qu'il a données de tous les basreliefs par son magnifique ouvrage sur le Boro-Budur, voudra sans doute compléter son cuvre. La tâche ne va pas sans difficultés, car au témoignage incontestable des inscriptions subsistantes, la recension du Karmavibhanga qu'on lisait au Boro-Budur ne concorde ni avec notre original sanscrit, ni avec aucune des versions tibétaines, chinoises ou houtchéenne.
Le Karmavibhanga, aulrement dit le Suka sūtra sanscrit, marque, par rapport au Cūla Kam mavibhanga pali et à la littérature qui en dérive, un soi-disant progrès dans l'application pratique de la loi du karman. La formule courante « A chacun selon ses cuvres » résume tout ce chapitre fondamental de la doctrine bouddhique, mais ici les cuvres ne sont pas, comme dans la morale chrétienne, restreintes à la durée d'une seule existence, et leur conséquence n'est pas une éternité à peu près immuable de béatitude ou de damnation. Le karman est la résultante d'une série innombrable d'existences, et