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Les reliques dans les religions de l'Inde*
Johannes Bronkhorst
Les deux grandes religions autochtones de l'Inde offrent au sujet du culte des reliques corporelles deux points de vue différents. Alors que le bouddhisme integre leur culte à ses pratiques, l'hindouisme en est dépourvu. Cette opposition est au coeur des réflexions de cet article.
J'y aborderai en particulier deux questions: 1. Comment doit-on expliquer la présence de reliques corporelles dans le bouddhisme tandis qu'elles sont absentes de l'hindouisme? 2. Comment le bouddhisme a-t-il réagi aux résistances hindoues à l'encontre du culte des reliques corporelles?
La question n'a pas reçu beaucoup d'attention dans la littérature secondaire moderne. Les encyclopédies nous offrent principalement trois réponses, dont nous allons étudier la teneur en détail.
Première réponse: Contrairement à l'hindouisme,
le bouddhisme a un fondateur historique
Le bouddhisme a un fondateur historique. Tout ce qui reste de ce fondateur historique - il s'agit en premier lieu d'os et de dents, mais aussi de cheveux et de rognures d'ongles-est objet de vénération pour ceux qui acceptent l'enseignement du Bouddha comme représentant la vérité absolue. L'hindouisme par contre ne possède pas de fondateur historique, et par conséquent pas de reliques d'un fondateur susceptibles de devenir objets de vénération. Nous adoptons ici comme carac térisation de l'hindouisme l'acceptation, au moins en théorie, de l'autorité du Veda. Cette caractérisation s'applique à une grande partie des mouvements religieux que l'on connait sur la base des textes qu'ils nous ont laissés, et s'avérera donc utile à notre discussion. Le Veda est un corpus textuel de grande taille, qui n'est • Mes remerciements & John S. Strong pour m'avoir envoyé deux de ses publications sur les
reliques bouddhiques avant même leur parution, et a Karel R. van Kool pour la générosité avec laquelle il a partagé ses idées. Des remerciements également à Pascale Hugon pour ses critiques et
suggestions d'amélioration. 1 P. ex., New Encyclopaedia Britannica, 15th edition, vol. 9 p. 1015 (réponses 1 et 2). ERE vol. 10
p. 661 (réponse ). ER vol. 12 p. 276 (réponses 2 et 3).